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Le gouvernement a adopté, jeudi 3 mars, un projet de décret d’application relatif à la loi 13.21 et aux usages licites du cannabis. Trois régions ont été autorisées par le gouvernement à exercer desactivités liées à la culture, à la production, à l’implantation et à l’exploitation du cannabis : il s’agit des régions d’Al Hoceima, de Chefchaouen et de Taounate.
D’autres provinces pourraient toutefois à leur tour obtenir une autorisation, «suivant l’intérêt manifesté par les investisseurs nationaux et internationaux à l’égard des activités liées à la chaîne de production du cannabis», selon les mots de Mustapha Baitas, porte-parole du gouvernement. Jusqu’à présent, la culture illégale du cannabis existait dans six provinces?du Royaume : Al Hoceïma, Chefchaouen, Ouezzane, Taounate, Larache et Tétouan, tel que rapporté par les données du ministère de l’Intérieur.
Le projet de décret adopté hier confie également à l’Agence nationale de régulation des activités liées au cannabis «l’accompagnement des demandeurs de licence et la facilitation de la mise en œuvre des démarches administratives liées à son octroi». Une commission consultative sera également mise en place et sera chargée de l' »examen des demandes d’autorisations ».
Pour éviter tout détournement du cannabis à des fins illégales, le décret impose aux titulaires de licence de soumettre à l’Agence nationale «des rapports mensuels sur les entrées et sorties de cannabis, ainsi que sur l’état du stock, des semences, des plants et produits, ainsi qu’un inventaire physique annuel de chaque pépinière et de ses produits», a précisé le porte-parole du gouvernement.
Le projet de loi no13.21 relatif aux « usages licites du cannabis, médical, cosmétique et industriel » avait été adopté à la majorité par la Chambre des conseillers le 8 juin dernier, par 41 voix contre 11. La Chambre des représentants avait suivi, le 15 juin, en adoptant le projet en deuxième lecture, par 61 voix contre 25. La loi vise à soumettre toutes les activités liées à la culture, la production, la transformation, le transport, la commercialisation, l’exportation, et à l’importation du cannabis et de ses produits à un système de licence.
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Les prévisions économiques ambitieuses du Maroc
Avant le vote du texte, la commission de l’Intérieur à la Chambre des représentants avait organisé le 4 mai 2021 une journée d’étude sur l’utilisation du cannabis à des fins médicales et industrielles. Le ministère de l’Intérieur avait notamment présenté les conclusions d’une étude de faisabilité, dressant l’état des lieux du marché et des divers usages médicaux, industriels et cosmétiques du chanvre, ainsi que les perspectives d’insertion dans le marché mondial et légalisé.
Quatre pays européens ont en effet été ciblés de manière prioritaire par le Royaume pour la commercialisation du cannabis médicinal marocain : l’Espagne, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et l’Allemagne. Pour ces quatre marchés, les projections de l’Intérieur tablent sur un chiffre d’affaires s’élevant à 25 milliards de dollars en 2028. En tenant compte du potentiel des marchés français et italien, le gouvernement estime que cela pourrait élever le chiffre d’affaires à 42 milliards de dollars. Au total, la quote-part, soit la part que percevra le Maroc, pourrait s’élever à 4,2 milliards de dollars selon l’hypothèse basse du gouvernement, et à 6,3 milliards de dollars selon l’hypothèse haute.
L’étude nuance toutefois, en précisant que «la taille actuelle du marché européen est encore faible afin de pouvoir absorber une part importante de la production nationale, et convertir un grand nombre d’agriculteurs d’une activité illégale à une agriculture légalisée», qualifiant toutefois le marché légal de«prometteur» et connaissant une «croissance significative».
En outre, plusieurs marchés de l’usage légal du cannabis sont déjà en place en Europe. Le Maroc s’est fait distancer, du propre aveu du ministre de l’Intérieur Abdelouafi Laftit lors d’un premier passage devant les députés au sujet de la légalisation, le 29 avril dernier : «Le but est d’aller vite, car nous sommes en retard», avait alors déclaré le ministre.
S’agissant du marché américain, l’étude présentée en mai dernier estime que «l’interdiction fédérale rend le commerce international illégal aux États-Unis, ce qui réduit l’attractivité de ce marché». Si le marché canadien est jugé «mature», le gouvernement l’estime «fermé en termes d’importations».
Lire aussi :Culture du cannabis : les recommandations du CESE
Premier producteur mondial
Le Maroc avait été classé premier producteur mondial de résine de cannabis, selon le rapport annuel 2020 de l’Office des Nations unies contre la drogue et le crime.
Les chiffres du ministère de l’Intérieur marocain font état quant à eux «55.000 hectares cultivés en 2019», essentiellement dans le Nord, avec des revenus annuels qui sont passés d’environ 500 millions d’euros au début des années 2000 à près de 325 millions d’euros en 2020. L’Intérieur estime en outre que le «chiffre d’affaires consolidé en Europe» découlant de la vente illégale s’élève à près de 10,8 milliards d’euros.
Toujours concernant le stock écoulé à travers le trafic pour un cannabis consommé de manière « illicite », une étude publiée en 2020 par le réseau indépendant Initiative mondiale contre la criminalité transnationale organisée estimait que la production du Maroc représentait plus de 700 tonnes par an, pour une valeur totale d’environ 19 milliards d’euros.
Cultivé depuis des siècles dans la région montagneuse du Rif, autorisé sous le protectorat français, interdit depuis l’indépendance, mais toléré depuis, le « kif » fait actuellement vivre 400.000 personnes, soit 60.000 familles, selon les chiffres officiels du gouvernement. La légalisation du chanvre au Maroc est destinée à un usage médicinal et pharmacologique, une utilisation industrielle (matériaux de construction, textile, papier, industrie alimentaire et industrie automobile), mais également à des fins cosmétiques.
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