Comme le reste du monde, le Maroc ne sera pas épargné par l’impact de la guerre entrela Russie et l’Ukraine, les deux pays étant des partenaires commerciaux du Royaume. Ce conflit, ayant déjàfranchi un premier cap il y a huit ans, a été exacerbé jeudi dernier, lorsque les forces militaires russes et ukrainiennes se sont à nouveau affrontées. Bien qu’elle soit très éloignée des côtes marocaines,cette guerreest susceptible d’avoir des conséquences de grande envergure sur le Maroc.
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Un défi diplomatique
Pour Rabat, cette escalade de tensions représente à la fois un défi diplomatique et économique. En effet, le gouvernement marocain s’efforce depuis plusieurs années d’établir des relations diplomatiques et commerciales positives avec Kiev et Moscou. Les liens russo-marocains ont d’ailleurs connu un élan significatif qui a suscité des inquiétudes à Alger, qui considèrela Russie comme un allié et un fournisseur militaire important.
Aussi, le Maroc est un allié majeur non membre de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), un fervent défenseur de l’intégrité territoriale des États au sein des forums internationaux et un partenaire commercial de l’Ukraine. Rien qu’en 2020, le pays a importé pour plus de 437 millions de dollars de biens ukrainiens, tout en exportant 56 millions de dollars vers l’Ukraine.
Alors que certains pays, notamment les membres de l’OTAN, n’ont pas hésité à condamner l’affrontement en cours et à exprimer leur opposition à la Russie, le ministère marocain des Affaires étrangères est resté discret sur la question. Il s’estplutôt concentré sur le rapatriement des citoyens marocains établis en Ukraine et adéclaré, deux jours après le début des hostilités,qu’il suit avec inquiétude l’évolution de la situation entre Kiev et Moscou.La tutelle a également soulignéque «le Royaume du Maroc réitère son soutien à l’intégrité territoriale et à l’unité nationale de tous les États membres des Nations Unies» ainsi que «son attachement au principe de non-recours à la force pour le règlement des différends entre États et son encouragement de toutes les initiatives et actions favorisant un règlement pacifique des conflits».
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La menace d’une nouvelle explosion des prix
Si l’aspect diplomatique de ce conflit est un casse-tête pour le Maroc, son aspect économique est encore plus pesant. Selon le porte-parole du gouvernement, Mustapha Baitas, cette guerre risqued’affecter les prix des produits de base du pays. La dépendance du Royaume à l’égard des exportations de céréales en provenance de Russie et d’Ukraine est une préoccupation majeure pour Rabat. En 2020, le Maroc a importé 286 millions de dollars de céréales ukrainiennes et a acheté des céréales russes pour110 millions de dollars. Il est également fortement tributaire des exportations russes annuelles de minéraux, de produits chimiques et d’énergie qui s’élèvent àplus d’un milliard de dollars et qui contribuent à alimenter l’industrie marocaine.
C’est en raison de cette dépendanceque le Royaume pourraitressentir les effets de cette guerre. L’importanteconsommation de pain au Maroc, dont l’élément principal est la farine de blé,risque de faire grimper les coûts dans un contexte de flambée des prix alimentaires dueau bouleversementactuel de la chaîne d’approvisionnement, à la sécheresse et aux effets de la Covid-19.
En outre, les nouvelles sanctions internationales imposées à la Russie devraient faire grimper les prix des carburants et de l’énergie, car l’un des plus grands exportateurs de pétrole et de gaz au monde devra faire face à de lourdes pénalités. Les prix de l’énergie ont généralement un impact sur les coûts sur tous les fronts, du transport à la fabrication, réduisant le pouvoir d’achat des populations mondiales. Le prix du pétrole a déjà franchi la barre des 100 dollars et risque d’augmenter encore plus. Cette hausse des prix à la pompe, notamment celui du gasoil, a d’ailleurs poussé les professionnels de la route à menacer de la répercuter sur leurs clients.
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Une menace pour toute l’Afrique du Nord
Par ailleurs, le Maroc n’est certainement pas le seul à subir les conséquences de la guerre en Ukraine.La plupart des nations d’Afrique du Nord dépendent en effet des exportations de la région en conflit, notammentl’Égypte et la Tunisie, qui toutes deux reposent sur les importations de céréales russes et ukrainiennes. De son côté, l’Algérie dépend de la Russie pour près de 30% de ses besoins en pétrole raffiné et importe chaque année pour plus de 153 millions de dollars de céréales ukrainiennes. Les économies déjà fragiles de la Tunisie et de l’Algérie risquent ainsi de souffrir de nouveaux coups durs, alors qu’une grande partie de leurs populations se trouvent au bord de la pauvreté. Il faut souligner quela hausse du prix du pain n’est pas seulement une question économique. Il existe une corrélation étroite entrecette augmentationet la probabilité de soulèvements populaires et de révolutions.
Enfin, l’Égypte et le Maroc ont multiplié les efforts pour assurer leurs réserves de céréales, mais la Tunisie, la Libye et l’Algérie sont confrontées à une déstabilisation potentielle en raison des répercussions économiques du conflit en Ukraine. Alors que les combats en cours en Europe de l’Est ont été décrits comme une menace qui se limite aux pays du vieux continent,il est sûr que leurseffetsse feront ressentir en Afrique du Nord et au-delà. Et bien que des considérations militaires et géopolitiquespourraient aboutir à une reprise des négociations entre la Russie et l’OTAN, l’impact du conflit pourrait avoir des répercussions de grande ampleur et durables sur un monde qui se remet à peine de la crise de la Covid-19.
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