Selon l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), l’addiction est un dysfonctionnement chronique du système cérébral qui implique la récompense, la motivation et la mémoire. Il s’agit de la façon dont le corps devient dépendant d’une substance ou d’un comportement, surtout si cela entraîne une recherche compulsive ou obsessionnelle de la «récompense» et un manque de préoccupation pour les conséquences.
Les dépendances aux drogues les plus courantes sont celles à la nicotine, présente dans le tabac, le THC, présent dans le cannabis, les opioïdes (narcotiques) et la cocaïne. Outre les substances, il existe des comportements qui peuvent déclencher une dépendance. Ainsi, au même titre que celle à la nicotine, les drogues et l’alcool, l’addiction aux jeux vidéo, aux jeux d’argent, au sexe ou aux achats compulsifs sontformellement reconnues comme des maladies. Certains comportements sociaux ouhabitudes ressemblent à une dépendance. Toutefois, dans le cas d’une dépendance, la personne réagit négativement lorsqu’elle n’obtient pas sa «récompense». Par exemple, une personne dépendante du café peut éprouver des symptômes de sevrage physiques et psychologiques, tels que de graves maux de tête et de l’irritabilité.
Les troubles liés à l’usage de substances, la plus grave forme de l’addiction, impliquent généralement des schémas comportementaux dans lesquels les personnes continuent à prendre une substance malgré les problèmes causés par son usage. Les personnes atteintes d’un trouble de l’usage des substances se concentrent sur la consommation d’une ou de plusieurs substances, telles que l’alcool, le tabac ou les drogues illicites, au point d’altérer leur capacité à vivre normalement.
Les personnes souffrant de dépendance sont également sujettes à des cycles de rechute et de rémission. Cela signifie qu’elles peuvent passer d’une consommation intense à une consommation légère. Malgré ces cycles, les dépendances s’aggravent souvent avec le temps. Elles peuvent entraîner des complications permanentes pour la santé. Une personne souffrant d’une dépendance est incapable de s’éloigner de la substance ou d’arrêter le comportement addictif. Elle fait preuve d’un manque de maîtrise de soi et a un désir accru pour la substance ou le comportement.
Lorsqu’une personne souffre d’un trouble lié à la consommation d’une substance, elle développe généralement une tolérance à cette substance, ce qui signifie qu’elle a besoin de plus grandes quantités pour en ressentir les effets. Ces personnes peuvent être conscientes de leur problème, mais ne pas être en mesure de s’arrêter, même si elles le veulent et essaient. La dépendance peut entraîner des problèmes physiques et psychologiques ainsi que des problèmes interpersonnels, notamment avec les membres de la famille et les amis ou au travail.
État des lieux au Maroc
Le Maroc est, de par sa situation géographique, un carrefour du trafic des drogues. Par conséquent, environ 4,1% de la population marocaine de plus de 15 ans consomme de la drogue et 2,8% souffrede dépendance. Ainsi, le Royaume se situe dans la moyenne mondiale d’usage de drogues.
95% de ces usagers de drogues sont accros au cannabis, indiquent les statistiques livrées en 2015 par l’Observatoire national des drogues et des addictions. Selon ces chiffres, un lycéen sur 5 a déjà fumé une cigarette et un sur 10 a touché au cannabis. La jeunesse marocaine consomme actuellement, et de plus en plus tôt, non seulement du cannabis et de la nicotine, mais aussi de l’alcool, de l’ecstasy et de nouvelles drogues de synthèse. Certes, l’usage des drogues touche principalement les jeunes et les jeunes adultes. Toutefois, dans quelques villes marocaines, spécifiquement Casablanca, la consommation commence de plus en plus tôt, soit dès l’âge de 7-8 ans.
Des solutions de prévention, de réduction des risques ou de soins
Le Royaume a été le troisième pays musulman à adopter la politique de réduction des risques parmi les personnes qui s’injectent des drogues en 2007. Il a également introduit le traitement par agonistes opioïdes en 2010.
Afin de lutter contre ce fléau, plusieurs enquêtes épidémiologiques sont menées régulièrement dans la population générale et particulièrement chez les jeunes. Une politique globale et intégrée a impliqué aussi bien les professionnels de soins que les organisations de la société civile dans le processus de prise en charge des troubles addictifs. Le Maroc a aussi instauré des formations universitaires d’addictologie et des programmes de renforcement des capacités des associations thématiques et des pairs aidants.
Malgré ces efforts, des insuffisances sont encore bien présentes, et ce, sur les plans des ressources humaines qualifiées, de la généralisation des structures de soins sur tout le territoire marocain ainsi qu’à certaines populations bien ciblées vulnérables telles que les femmes, les jeunes, les détenus et les migrants…
Il y a eu par ailleurs une participation assez importante dans la création des services de soins ambulatoires et résidentiels. Ces derniers, quoiqu’ils soient peu nombreux, ont commencé leurs activités depuis la fin des années 1990. Outre leur nombre réduit, les centres sont payants et ne permettent qu’un accès limité. La consultation ainsi que les contrôles de suivi qui se font tous les quinze jours sont coûteux. Sans compter les traitements médicamenteux qui ne sont pas remboursés puisque l’addiction n’est toujours pas considérée comme une maladie. Ceci est également dû au fait que les personnes en situation de dépendance sont considérées comme étant «responsables» de leur sort. Une conception erronée rejetée par l’OMS, qui souligne que «la dépendance est une maladie du cerveau qui appelle des soins médicaux et un accompagnement psychosocial».
La lutte contre l’addiction dans le viseur du CESE
Afin de pallier ces dysfonctionnements, la Direction de l’épidémiologie et de la lutte contre les maladies du ministère de la Santé a adopté, le 18 janvier 2018, un plan stratégique national de prévention et de prise en charge des troubles addictifs. L’objectif est de dresser un plan de travail dans le traitement et la prévention des addictions au Maroc.
En outre, le Conseil économique, social et environnemental a produit un rapport sur les addictions au Maroc qui a été adopté par l’assemblée générale du 29 décembre. Dans ce document qui n’a toujours pas été publié, l’institution constitutionnelle indépendante traite la dépendance à des substances légales ou illégales. Une première !
Selon les premières révélations, le volume d’affaires des seules substances et activités légales représente plus de 3% du PIB et plus de 9% des recettes de l’État. Le rapport revient également sur les vulnérabilités particulières aux addictions dans les entreprises ou en milieu carcéral, mais aussi parmi les sportifs, les jeunes et les femmes.
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