Accueil / Économie

Amine Diouri : «Les défaillances d’entreprises marocaines montent en flèche»

Temps de lecture

Une Relance économique qui tarde, des délais de paiement qui s’allongent, des banques qui resserrent la vis et l’Etat qui suspend des dispositifs d’aides aux entreprises. Le tableau de bord des opérateurs économiques, en particulier les TPME, est sombre et l’incertitude reste de mise. Le point avec Amine Diouri, directeur études et communications du cabinet Inforisk.

LeBrief : Les cas de défaillance des entreprises marocaines ont explosé à cause de la Covid-19, particulièrement les très petites et moyennes entreprises (TPME). Qu’en est-il actuellementaprès la suspension de quelques programmes d’aide au financement initiés en 2020 ?

Amine Diouri : Effectivement, l’entreprise marocaine fait face aujourd’hui à des tensions majeures au niveau de sa trésorerie, en particulier chez les très petites, petites et moyennes entreprises (TPME), qui constituent plus de 90% du tissu économique du pays. La non-reconduction de certains programmes d’aides au financement, notamment les dispositifs Damane Oxygène et Damane Relance, a provoqué une montée en flèche des cas de défaillances d’entreprises, des faillites et des liquidations judiciaires. Alors qu’ils avaient permis la survie de dizaines de milliers d’entreprises, en particulier les TPME qui sont réputées pour leur fragilité, on assiste maintenant à un effet retour à cause de la suspension des dispositifs précités. Le taux de défaillance a augmenté de 25% durant les six premiers mois de cette année par rapport à 2019. C’est une situation inquiétante qu’il faut suivre de très près.

Lire aussi :Crise des TPE-PME : un programme de sauvetage doit être établi en urgence

D’un autre côté, les banques resserrent la vis en termes d’octroi des crédits. L’accès au financement devient de plus en plus compliqué pour ces entreprises. La hausse des cas de fraude yest-elle pour quelque chose?

Je rappelle que les produits Damane ont permis de maintenir des dizaines de milliers d’entreprises en vie, mais celles-ci devaient retrouver une activité économique normale, car le crédit ne peut pas, à lui seul, maintenir la survie de l’entreprise. Or, avec les mesures restrictives, le manque de visibilité et la lenteur de la relance économique dans certains secteurs, ces entreprises se retrouvent en grave difficulté financière, ajoutée à cela l’allongement des délais de paiement. Outre l’augmentation des cas de fraude, les défaillances pour motifs économiques ont été beaucoup plus importantes, ce qui a causé des niveaux records en termes d’incidence et d’impayés. Nous avons assisté à un niveau d’impayés jamais enregistré auparavant dans le secteur bancaire. Il a dépassé 80 milliards de DH (MMDH). C’est du jamais vu ! Heureusement que ce niveau n’impactera pas lourdement les banques puisqu’elles disposent de fonds propres solides. Les banques sont, par ailleurs, tenues à respecter des règles prudentielles. Elles doivent être plus regardantes lorsqu’elles accordent des prêts, que ce soit à des particuliers ou à des entreprises.

Lire aussi :Secteur privé marocain, un véritable outil de sortie de crise

Certains avancent qu’il s’agit pourtant de prêts garantis par l’État?

Ce n’est pas parce que ce sont des prêts garantis par l’État qu’il ne faut pas être sélectif. Et puis si les impayés et les cas de fraude augmentent, ce sont les finances de l’État qui seront impactées. Il aura recours à des endettements, et qui dit endettement dit risque d’augmentation des taxes et des impôts. Donc cela se répercutera sur les citoyens, il s’agit d’un cercle vicieux. Que ces prêts soient garantis par l’État ou pas, les banques sont tenues de respecter la réglementation et ne peuvent pas octroyer des prêts sans être sûres qu’ils seront remboursés. Par ailleurs, on observe une sous-capitalisation de beaucoup d’entreprises. Les actionnaires doivent également mettre la main à la poche et renforcer les fonds propres de leurs entreprises pour faire face à la crise. Le crédit peut agir favorablement dans le cadre d’un cycle de financement, mais la structure de l’entreprise doit également être solide.

Lire aussi :Quel avenir pour les startups marocaines après la crise du Covid-19 ?

L’allongement des délais de paiement durant cette crise a également créé des tensions au niveau de la trésorerie des entreprises. L’État ne sévit-il pas suffisamment pour lutter contre les mauvais payeurs?

Outre la problématique du financement, l’allongement des délais de paiement pose effectivement un réel problème aujourd’hui. Ces délais sont toujours très élevés, une situation qui s’est aggravée durant cette crise. Un projet de loi pénalisant les mauvais payeurs suit actuellement son circuit législatif. Nous suivons de près ce texte de loi qui permettra à l’État d’intervenir directement en sanctionnant.

Dernier articles
Les articles les plus lu

BAM : les dépôts bancaires ont progressé 7% à fin octobre

Économie - BAM indique que les dépôts bancaires se sont établis à 1.213,2 milliards de dirhams (MMDH) à fin octobre, soit une hausse de 7%.

Mbaye Gueye - 11 décembre 2024

BAM : les crédits bancaires ont atteint 1.121,1 MMDH à fin octobre

Économie - L’encours du crédit bancaire s’est établi à 1.121,1 milliards de dirhams (MMDH) durant les dix premiers mois de 2024.

Mbaye Gueye - 11 décembre 2024

Investissements record : 134 MMDH et 28.000 emplois validés

Économie - Aziz Akhannouch a présidé la 6ᵉ Commission Nationale des Investissements, instituée par la nouvelle Charte de l’Investissement, a approuvé 56 projets pour un montant total de 134 milliards de dirhams.

Ilyasse Rhamir - 10 décembre 2024

Conseil de la Concurrence : le marché des aliments composés fait face à un monopole

Économie - Les aliments pour volaille représentent à eux seuls plus de 76 % de la production totale, suivis par les aliments pour bovins, ovins et caprins.

Mbaye Gueye - 10 décembre 2024

AMDIE : prorogation des délais pour les programmes d’accompagnement à l’export

Économie - L'AMDIE, en collaboration avec le ministère et l’ASMEX, a annoncé la prolongation des délais pour ses programmes à l’export.

Rédaction LeBrief - 10 décembre 2024

Rail marocain : cap sur 2030 avec une révolution ferroviaire

Économie - Lors du Rail Industry Summit, des responsables et experts ont dévoilé un plan ambitieux pour révolutionner le réseau ferroviaire national.

Ilyasse Rhamir - 10 décembre 2024

Rencontre entre la Confédération des TPE-PME et Nadia Fettah

Économie - L’objectif de cette réunion était de traiter les enjeux économiques pesant sur les TPE-PME, qui constituent 98% des entreprises marocaines.

Rédaction LeBrief - 10 décembre 2024

Al Haouz : +16% de nuitées à fin octobre 2024

Économie - Les EHTC de la province d’Al Haouz ont connu une augmentation notable de leur activité au cours des dix premiers mois de l’année 2024.

Rédaction LeBrief - 10 décembre 2024
Voir plus

PLF 2023 : Aziz Akhannouch, grand ami des patrons ?

Afrique, Économie, Économie - Baisse historique de l'IS de 11 points, réduction de l’impôt sur les dividendes et absence d'une taxe sur les superprofits

Atika Ratim - 4 novembre 2022

Pêche et aquaculture en UE : le Maroc sur le podium des fournisseurs

Économie - Les exportations de produits de la pêche et de l'aquaculture vers UE occupent une place de premier plan.

Sabrina El Faiz - 28 mars 2024

Fiscalité : permanence exceptionnelle de la TGR avant la fin d’année

Économie - La TGR informe les contribuables d’une permanence exceptionnelle pour l’échéance fiscale du 31 décembre 2024.

Rédaction LeBrief - 27 décembre 2024

CEMAC : recul du taux de souscriptions aux titres publics de la BEAC

Afrique, Économie, Économie -Les données de la CRCT révèlent que les titres publics émis sur le marché de la BEAC entre juillet et août 2022 ont connu une baisse de 30% du taux de souscription.

Nora Jaafar - 14 septembre 2022

Lutte contre le blanchiment d’argent : le Maroc bon élève ?

Économie - Plus de 2.000 milliards de dollars. Voilà ce que pèserait chaque année le blanchiment d’argent dans le monde.

Atika Ratim - 17 janvier 2023

PLF 2024 : la TVA de la discorde

Économie - Au Parlement, le PLF 2024 est au cœur des débats et la Taxe sur la valeur ajoutée (TVA) est très tendu.

Rédaction LeBrief - 10 novembre 2023

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire