Cinq jours après l’instauration du pass vaccinal obligatoire, plusieurs questions restent en suspens. Au sein des entreprises, c’est l’incompréhension et le manque de visibilité qui prédominent depuis le jeudi 21 octobre, date du début de l’application de cette mesure. La Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) avait d’ailleurs envoyé une lettre au gouvernement afin de connaître les détails de la mise en application du pass vaccinal au sein des entreprises. Quatre principales questions sont adressées à l’exécutif: «En plus des hôtels, cafés et restaurants, est-ce que les autres entreprises du secteur privé sont concernées par cette mesure ? Si tel est le cas, en plus des salariés, est-ce que cela s’applique aux visiteurs ? Si un salarié ne dispose pas du pass vaccinal, quelles sont les mesures que peut engager l’entreprise ? Quelles sont les modalités de contrôle du pass vaccinal (présentation de la CIN, application pour lecture et contrôle des QR code des pass vaccinaux) ? Les pass vaccinaux étrangers sont-ils valables ?», avait demandé la CGEM.
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La CGEM attend toujours
Près d’une semaine après cette requête, le patronat est toujours dans l’expectative. «Nous n’avons pas encore reçu de réponse de la part du gouvernement à nos multiples interrogations. Cette décision devait être accompagnée de mesures d’application, or, jusqu’à aujourd’hui on ne sait pas comment gérer dans le détail l’application de cette nouvelle mesure, ceci tout en respectant la loi, notamment vis-à-vis des employés et des visiteurs», nous confie Hicham Zouanat, président de la commission sociale de la CGEM.
Même son de cloche auprès de Mohamed Abou El Fadel, secrétaire général de la Fédération marocaine des cafés et de la restauration rapide et coordinateur de la Confédération marocaine des métiers de bouche. Joint par nos soins, Mohamed Abou El Fadel nous témoigne son désarroi face à une décision «précipitée qui comporte plusieurs zones d’ombres».
«Nous ne sommes pas contre le pass vaccinal. Nous demandons juste au gouvernement de nous donner un délai pour son application, et plus important de préciser tous les détails entourant sa mise en œuvre. On ne peut pas décider l’application d’une mesure sans préparer le terrain et impliquer toutes les parties prenantes», nous explique Mohamed Abou El Fadel.
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Les zones d’ombre d’une décision « précipitée »
Cette décision, malgré le fait qu’elle a pu accélérer la cadence des vaccinations au Maroc, a créé un véritable cafouillage au sein des entreprises. Un gérant d’une salle de sport a partagé avec Lebrief.ma ses inquiétudes. «J’ai reçu la visite des agents d’autorité la veille de l’application du pass vaccinal. On m’a sommé de contrôler l’accès des personnes, que ce soit pour les employés, les clients ou les visiteurs, au risque de subir une fermeture de quelques jours de mon établissement. Or, sur le point de vue légal, je ne suis pas protégé. Si je vire un employé qui refuse d’être vacciné, je dois lui payer ses indemnités, chose que je ne pourrais pas faire vu la situation de crise que nous traversons. Et si je ne le licencie pas, je risque une fermeture. Nous ne savons plus à quel saint nous vouer. Nous demandons des éclaircissements de la part du gouvernement», précise notre interlocuteur.
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Que dit la loi?
Pour avoir un avis juridique et légal sur la question, nous avions contacté Saïd Lamani, consultant en droit du travail et relations professionnelles et ex-inspecteurdu travail. Lamani est catégorique. «Un employeur ne peut pas exiger, mais seulement inciter ses salariés à se faire vacciner. Il n’a pas le droit de demander à un salarié de prouver qu’il est vacciné pour pouvoir venir travailler. Selon l’arrêt du Conseil constitutionnel français du 5 août 2021, un employeur ne peut pas licencier un salarié qui refuse de se faire vacciner, même s’il fait partie d’une profession soumise à l’obligation vaccinale», nous a précisé Saïd Lamani.
Un avis qui diverge avec celui d’un avocat qui nous a confié que l’employeur est en droit d’exiger du salarié la présentation de son pass vaccinal, et ce dans le cadre de l’article 24 du Code dutravail. Cet article stipule que «l’employeur est tenu de prendre toutes les mesures nécessaires afin de préserver la sécurité, la santé et la dignité des salariés».
Face à ce vide juridique, et puisque le licenciement ne serait plus possible, les employeurs peuvent activer d’autres leviers comme la suspension du contrat de travail, le télétravail ou faire bénéficier l’employé de son congé payé. En tout cas, une chose est sûre, le gouvernement doit sortir de son mutisme et communiquer avec toutes les parties prenantes, les employeurs, les employés, les syndicats… Un projet de loi qui détaille toutes les mesures relatives à la crise sanitaire serait aussi le bienvenu!
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