LeBrief: Comment les cafetiers et les restaurateurs ont-ils accueilli la décision relative à l’instauration du pass vaccinal?
Mohamed Elfane: Je tiens tout d’abord à préciser que le pass vaccinal ne constitue pas une problématique pour nous. Il peut d’ailleurs être une solution pour sortir d’une crise sanitaire et s’assurer que tous les citoyens soient vaccinés. L’idée de l’instauration d’un pass vaccinal est donc respectable à mon sens. Toutefois, ce que nous fustigeons, c’est la manière par laquelle cette décision a été appliquée. On ne vient pas annoncer l’application d’une décision très contraignante en ne nous laissant que deux jours pour nous y adapter, deux jours qui ont d’ailleurs été fériés.
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Plusieurs ont protesté contre cette décision de dernière minute dont la mise en application pose plusieurs questions. Comment vous êtes-vous adaptés à cette mesure ?
Cette décision va impacter tous les secteurs et les citoyens. On ne vient pas exiger de nouvelles mesures restrictives du jour au lendemain sans préparation. Ce sentiment de frustration prévaut depuis le début de cette pandémie. Nous nous attendions à une rupture et un changement dans la méthode de prises de décisions avec l’arrivée de ce nouveau gouvernement. Malheureusement, nous constatons qu’il s’inscrit dans la continuité des mesures inadaptées et non préparées, en plus d’une absence d’implication et de communication. Le ministère de tutelle devait échanger avec nous, communiquer et se concerter avec les associations, les fédérations et les chambres de commerce. C’est tout ce que nous demandons. Nous ne sommes pas contre ce type de décisions.
Pour revenir à votrequestion, cette décision va impacter considérablement tous les prestataires de services et tous les secteurs, notamment le prêt-à-porter, les commerces de proximité, les cafés et les restaurants. À notre niveau, je ne vous cache pas que nous avons été surpris par la méthode utilisée par les autorités. Nous n’avons été contactés que la veille de l’application de cette décision, puisque la circulaire officielle est tombée le mercredi 20 octobre pour une application le lendemain. Les autorités locales se sont rendues, le mercredi soir, chez les différents établissements pour leur ordonner d’effectuer un contrôle au niveau de l’accès et n’accueillir que ceux qui sont munis de leur pass vaccinal.
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Or, plusieurs clients ont refusé de présenter des documents relevant de leur propriété privée à une personne qui ne représente pas l’autorité…
Justement, et c’est tout à fait compréhensible. Tu ne peux pas obliger un client qui veut rester dans l’anonymat de révéler son identité, ça ne relève pas de nos prérogatives. Je suis censé accueillir un client et le servir. Je ne suis pas un agent d’autorité. C’est au gouvernement de mettre en place un système de contrôle où des agents peuvent verbaliser des contrevenants. Ma responsabilité se limite dans l’affichage d’une note bien mise en évidence où j’informe mes clients qu’ils doivent être munis de leur pass vaccinal pour pouvoir bénéficier de nos services.
Quel sera l’impact de cette décision sur votre activité?
Cette décision intervient après le récent allégement des mesures restrictives. Nous avions commencé à reprendre notre souffle après une crise importante où les propriétaires des cafés et des restaurants ont été marginalisés par l’ancien gouvernement. Nous avons supporté le fardeau des loyers, des dettes, des pertes d’emplois et aujourd’hui on porte encore un énième fardeau. Vous savez, rien qu’hier, le jeudi 21 octobre, quatre restaurants ont été fermés à Rabat par les autorités après un contrôle des clients et des collaborateurs. C’est du n’importe quoi. On punit les entreprises alors qu’elles ont besoin de soutien. Nous sommes entre le marteau et l’enclume. On décide de fermer un établissement, car un employé ne dispose pas d’un pass vaccinal, et on ne prépare pas l’outil législatif pour ce genre de cas. Si je décide de renvoyer un employé qui ne s’est pas fait vacciner ou qui ne dispose pas de pass vaccinal, je serais lésé, car je dois lui payer ses indemnités.
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Quelles sont les actions que vous comptez entamer pour faire entendre votre voix?
L’élément qui tue, c’est le manque de communication et de prévision. Aujourd’hui, après près de deux ans, les autorités sont en principe avisées et averties. Mais on s’aperçoit que les mêmes méthodes sont utilisées. Pour le moment, nous allons envoyer une lettre au ministre de l’Industrie et du Commerce et au Chef du gouvernement pour leur exprimer notre étonnement face à l’absence d’une préparation notamment logistique et législative d’une telle décision extrêmement contraignante.
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