Accueil / Politique

Législatives 2021 : la chute du PJD et la percée des partis libéraux

Temps de lecture

L’ampleur de la défaite du Parti de la justice et du développement (PJD) aux élections de 2021 était inattendue. Passant de 125 sièges à 13 à la suite du scrutin du 8 septembre dernier, il a été largement devancé par le Rassemblement national des indépendants (RNI, 102 sièges) et le Parti authenticité et modernité (PAM, 86 sièges) puis par les cinq autres grands partis. Qu’est-ce qui a provoqué la déroute historique du parti de la lampe ? Comment les partis libéraux ont-ils réussi à décrocher la première et deuxième place aux législatives ? Et quel a été l’impact de l’adoption du nouveau mode de calcul du quotient électoral ?

Après 10 ans de gouvernance, le Parti de la justice et du développement (PJD) a essuyé une défaite cuisante lors des élections du 8 septembre 2021. Le parti de la lampe a perdu 112 sièges parlementaires, soit une baisse de 861,53 %, passant de 125 dans l’assemblée sortante à 13, selon les résultats annoncés par le ministère de l’Intérieur.b

L’ampleur de la déroute exceptionnelle du PJD était inattendue, mais «elle était une tendance déjà visible», souligne David Goeury, chercheur associé à l’association Tafra et géographe au laboratoire Médiations. Il explique que le déclin de ce parti s’est confirmé lorsqu’il n’apas réussi à mobiliser des candidats aux municipales, locomotives du scrutin législatif. «Déjà, depuis les élections syndicales, le PJD n’a pas réussi à se qualifier pour le dialogue social, il avait perdu son électorat. (…) Et puis, surtout, il n’a pas réussi à mobiliser ses candidats, puisqu’il a perdu 47 de ses candidats aux élections communales entre 2015 et 2021», indique Goeury. Ce dernier avance que les bilans peu convaincants des présidents des communes PJDistes, notamment dans les grandes villesdu pays (Rabat, Casablanca, Marrakech, Fès, Tanger ou encore Agadir) ont aussi contribué au vote sanction qu’a subi cette formation.

k

Lire aussi :Élections générales : qui sont les grands gagnants et perdants ?

De plus, plusieurs autres facteurs ont contribué à la descente aux enfers du PJD. Il s’agit, entre autres, des divisions internes auxquelles il a été confronté concernant deux dossiers majeurs, à savoir: la loi légalisant le cannabis thérapeutique pour laquelle les députés du PJD ont voté contre ; etle rétablissement des relations avec Israël, une «ligne rouge» pour les militants du parti. Outre ces dossiers majeurs, le parti, qui est resté au pouvoir pendant deux mandats gouvernementaux, a prouvé son incapacitéà apporter des changements importants et à développer le potentiel du pays, souligne Mustapha Sehimi, professeur de droit et politologue. Selon lui, l’offre programmatique du PJD était égalementdépourvue «d’identité et de singularité», d’autant plus qu’il n’a pas tenu les promesses qu’il a avancées lors de son dernier mandat, notamment sur le volet économique et social. Le professeur estime aussi que le «manque de charisme politique» du Chef du gouvernement sortant n’a pas servi les intérêts de cette formation.

Lire aussi :Majorité : les scénarios d’alliances possibles

S’agissant du nouveau mode de calcul du quotient électoral pource dernier scrutin, les deux experts en politiqueestiment que c’est peut-être cette réforme qui a permis au PJD de conserver certains sièges, notant qu’il serait réducteur d’expliquer sa chute par l’effet de ce mécanisme.

La percée des partis libéraux

Concernant la victoire écrasante du Rassemblement national des indépendants (RNI) aux élections législatives, elle est le fruit de plusieurs années de mobilisation massivede ses militants, notammentau niveau des élections communales. Le parti de la colombe a ainsi remporté 102 sièges, améliorant son score de 65 sièges par rapport à 2016, soit une augmentation de 175,67%. Durant les cinq dernières années, le RNI a déployé son réseau de candidats sur l’ensemble du territoire afind’assurer unmeilleur taux de couverture et atteindre80% des circonscriptions pour mieux défendre ses couleurs. De plus, lors de sa campagne électorale, il a mis en place l’initiative « 100 jours-100 villes »afin de se rapprocher des citoyens urbains. Selon David Goeury, «ce travail sur le terrain a été doublé d’une intense campagne sur les réseaux sociaux adressée prioritairement à des jeunes et des femmes urbains qui étaient donc à même d’adhérer au programme du parti».

Lire aussi :Législatives 2021 : retour sur un scrutin renversant

Le chercheur explique que la percée du parti de Aziz Akhannouch a été obtenue grâce à «une stratégie très importante de mobilisation électorale sur le terrain, les communes rurales et les petites villes, et à une stratégie de mobilisation autour de son programme, des nouveaux profils d’électeurs qui sont les jeunes et les femmes en milieu urbain». Ainsi, le RNI a su seprésenter comme une alternative «crédible» au PJD, et ce, en élargissant ses réseaux en dehors des secteurs traditionnels et électoraux et en se positionnant en tant que parti porteur d’une vision progressive. En tant que grand vainqueur de ces élections, cette formation bénéficiera d’une forte représentation dans la Chambre basse et dans les conseils communaux et régionaux.

S’agissantdu Parti authenticité et modernité (PAM), ce dernier a gardé sa deuxième position sur le podium. Il sera représenté à la Chambre des représentants par 86 députés, soit 15 sièges en moins par rapport à 2016. Cependant, pour Abdellatif Ouahbi, chef de file du parti du tracteur, ces résultats sont «très positifs malgré la période que le PAM a traversée et qui a été marquée par des problèmes et des différends d’ordre organique». Il a déclaré que les élections de 2021 constituent une «victoire pour la démocratie dans le Royaume», notant que le taux record de participation confirment l’attachement du peuple marocain au processus démocratique.

Lire aussi :Élections 2021 : 8,78 millions de Marocains ont voté

Enfin, il faut noter que les nombres importants de sièges que le RNI et le PAM ont réussià obtenir ont été une grande surprise pour les citoyens, car en raison de la nature du nouveau quotient électoral, l’on s’attendait à ce que le premier parti ne dépasse pas 85 sièges. D’ailleurs, ce nouveau mode de calcul basé sur le nombre des inscrits aux listes électorales et visant à permettre à plusieurs formations d’accéder à la Chambre basse, a impacté le nombre de sièges décroché par le PAM. Cependant, bien qu’il ait permis au PJD de garder 13 sièges, il n’est pas parvenu à assurer le même résultat pour les petits partis, la majorité d’entre eux ayant été éjectés de la course ou faiblement représentés.

Lire aussi :Quotient électoral : verdict de la Cour constitutionnelle

Dernier articles
Les articles les plus lu

10e Forum mondial de l’UNAOC : Nasser Bourita s’entretient avec ses homologues espagnol et portugais

Politique - Nasser Bourita a eu une série d’entretiens importants à Cascais dans le cadre du 10e Forum mondial de l'UNAOC.

Farah Nadifi - 27 novembre 2024

Maroc-Japon : renforcement de la coopération en matière d’investissement

Politique - Karim Zidane, a signé mercredi à Tokyo un Mémorandum de coopération avec le ministre japonais de l’Économie, du commerce et de l’industrie, Yoji Muto

Farah Nadifi - 27 novembre 2024

Omar Zniber préside un débat à Genève sur les entreprises et les droits de l’Homme

Politique - Le président du Conseil des droits de l’Homme, Omar Zniber, a présidé un débat consacré à l’entreprise et aux droits de l’Homme

Farah Nadifi - 27 novembre 2024

Réforme du CCM : la Chambre des conseillers approuve le projet

Politique - La Chambre des conseillers a approuvé le projet de loi relatif à l'industrie cinématographique et portant réorganisation du CCM

Farah Nadifi - 27 novembre 2024

Palestine : le Roi adresse un message au président du comité des Nations Unies

Politique - Le roi Mohammed VI a adressé un message au président pour l’exercice des droits inaliénables du peuple palestinien.

Rédaction LeBrief - 26 novembre 2024

Bourita représente le Maroc aux travaux du 10e forum de l’Alliance des civilisations

Politique - Lors de son discours, Bourita a souligné le rôle du Royaume dans le dialogue interculturel et interreligieux.

Rédaction LeBrief - 26 novembre 2024

Akhannouch rencontre la Première ministre de la RDC à Rabat

Politique - Aziz Akhannouch, a rencontré Suminwa Tuluka Judith, Première ministre de la République Démocratique du Congo.

Rédaction LeBrief - 26 novembre 2024

Une délégation des FAR à bord du porte-avions USS Harry S. Truman

Politique - Une délégation des FAR a effectué une visite à bord du porte-avions USS Harry S. Truman, au large de la ville d’Al Hoceima.

Mbaye Gueye - 26 novembre 2024
Voir plus

Grand oral d’Akhannouch : ce qu’il faut retenir

Économie, Politique - Aziz Akhannouch fait le point sur les mesures adoptées par son gouvernement pour protéger le pouvoir d’achat des citoyens.

Khadija Shaqi - 25 octobre 2022

La Mauritanie plaide pour un retour malien dans le G5 Sahel

Afrique, Politique, Politique - Le président mauritanien, Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani, plaide pour un retour du Mali au G5 Sahel.

Hajar Toufik - 11 juillet 2023

Le Maroc et l’intelligence artificielle : une vision claire pour un futur digital

Politique - Le Maroc se positionne comme un acteur clé dans l’essor de l’intelligence artificielle (IA) en Afrique et au-delà.

Farah Nadifi - 15 novembre 2024

Conseil de gouvernement : l’essentiel de la réunion de ce jeudi 9 novembre

Politique - Le Conseil de gouvernement a tenu sa réunion hebdomadaire ce jeudi sous la présidence du chef de l'exécutif Aziz Akhannouch

Hajar Toufik - 9 novembre 2023

Réforme du Code de la famille : l’UC salue l’engagement royal pour une justice sociale

Politique - Le parti de l'Union constitutionnelle a exprimé son soutien total à l'initiative de réforme du Code de la famille lancée par le roi Mohammed VI.

Rédaction LeBrief - 26 décembre 2024

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire