Accueil / Société

Achoura : croyances, traditions et pétards

Temps de lecture

Achoura est un jour marquant pour l’ensemble des croyants. Il est célébré par les juifs, les musulmans sunnites et chiites, mais pour des raisons différentes. Au Maroc, cette fête, synonyme de tradition et de joie, est célébrée pour la deuxième année consécutive dans une conjoncture de crise sanitaire. Malgré la situation épidémiologique actuelle, les pétards et les feux d’artifice sont toujours disponibles dans les villes du Royaume.

Le mois de Moharram 1443, le premier mois du calendrier islamique, a débuté le mardi 10 août 2021 au Maroc. Par conséquent, le jour de Achoura, qui correspond au dixième jour du premier mois de cette nouvelle année, tombe du 18 au 19 août de cette année. Il s’agit d’un jour où il est conseillé de jeûner. Cette fête, qui revêt une signification spirituelle et sociale indéniable, est perçue, depuis des siècles, comme celle de l’enfance. C’est aussi un jour de partage et de charité au cours duquel les enfants donnent libre cours à leur joie. La fête de Achoura a un sens profond pour les juifs et les musulmans. Pour l’ensemble des musulmans, ce jour est célébré par le jeûne et la prière, comme l’a fait le Prophète à Médine.

Achoura, une célébration religieuse pour les musulmans du monde entier

Les célébrations d’Achoura ont commencé lorsque le prophète Mohammed et ses disciples, une fois à Médine, ont découvert que la communauté juive jeûnait pour le Yom Kippour, le Jour des Propitiations ou le Jour des Expiations. Le prophète a ainsi demandé aux juifs pourquoi ils jeûnaient. Réponse : le but est de se souvenir du jour où Dieu a sauvé Moïse des Égyptiens. Ainsi le prophète a pensé qu’en tant que musulmans, ils devraient également faire de même, car Moïse est également un messager de l’islam. Il a donc déclaré que les musulmans devraient jeûner le 9eet le 10e jour du mois de Moharram. Cependant, puisque les musulmans et les juifs ne s’entendaient pas, Ramadan était le mois de jeûne des musulmans et Achoura était devenu une observance volontaire. Ainsi, le prophète a dit : «Allah remet les péchés d’une année passée à quiconque jeûne le jour de Achoura» [Rapporté par Mouslim].

Après la mort du prophète, un grand chiisme s’est produit au sein de la communauté musulmane, ce qui a causé la scission entre musulmans sunnites et chiites. Ceci est l’origine des différences dans la célébration d’Achoura. Pour les musulmans chiites, cette journée a pris un nouveau sens après la mort de Houssayn Ibnou Ali, petit-fils de Mohammed et troisième imam chiite. Il s’agit d’un jour de deuil commémorant la bataille de Karbalaa en Irak, qui a eu lieu en l’an 680 de l’ère chrétienne. Ainsi, pour ce courant, l’Achoura est une journée de pèlerinage, pour ceux qui le peuvent, dans un sanctuaire de Karbalaa, le Machhad Al-Houssayn, où se trouve la tombe de Houssayn Ibnou Ali. Les musulmans chiites portent des vêtements de deuil et évitent toutes sources de plaisir (interdiction de programmer un mariage ou une quelconque fête pendant cette journée).

Pour les sunnites, c’est un jour de joie et de célébration qui contraste vivement avec l’Achoura chiite. Les sunnites célèbrent la victoire d’Allah contre les Égyptiens. À cause de leur rivalité historique, il est courant que ce jour-là, et particulièrement dans les pays comptant de fortes communautés chiites et sunnites, des violences éclatent lors de ces célébrations.

Achoura à l’ère de la Covid-19

Au Maroc, les familles se rassemblent pour prendre des repas spéciaux et offrent une zakat (le dixième de leur revenu annuel) aux pauvres. Dans les rues, les feux de joie et les feux d’artifice sont d’autres moyens dépeignant ces festivités. Les magasins de toutes tailles offrent de nouvelles marchandises lors de la célébration d’Achoura. Les jouets et les tambours Taarija sont étalés partout dans les souks et certaines grandes surfaces marocaines. Les enfants descendent dans la rue pour célébrer la fête. La plupart d’entre eux attendent avec impatience le grand jour de ZamZam, tirant son nom de la fameuse source de La Mecque (les enfants sont libres de s’asperger les uns les autres avec de l’eau). Ils attendent surtout la présence de Baba Aïchour. Ce personnage, qui joue le rôle du père Noël des Marocains, est sorti d’une vieille légende populaire.

Cette fête est particulièrement appréciée par les enfants qui reçoivent de nombreux jouets. En cette période, le business des jouets bat tous les records. En effet, c’est la période où les marchands de jouets engrangent la plus grande part de leur chiffre d’affaires annuel. Toutefois, cette fête se caractérise cette année par un faible engouement pour les marchés de jouets en raison notamment de la hausse des prix, rapporte Maroc Diplomatique. «Depuis l’avènement de la pandémie de la covid-19, l’ambiance de cette fête religieuse qui permet de faire revivre des traditions marocaines ancestrales, n’est plus la même, étant donné que les rituels d’auparavant sont interdits dans le cadre des mesures préventives», explique le journal.

Lors de la célébration de cette fête l’année dernière, qui a lieu alors que le Maroc faisait face à une hausse des cas d’infections au coronavirus, des dizaines de jeunes avaient célébré Achoura par un grand rassemblement avec des pneus brûlés sur les places publiques. Des affrontements avaient eu lieu entre des adolescents et les forces de l’ordre dans les villes de Casablanca, Rabat et Marrakech. Près de 160 individus, dont des mineurs, ont été interpellés lors des célébrations de la fête d’Achoura pour implication présumée dans des actes de vandalisme et de résistance aux forces publiques. Cette année, afin d’éviter que cela ne se reproduise pas, les citoyens sont appelés à commémorer cette fête tout en respectant les mesures sanitaires.

Achoura et pétards

Chaque année, c’est le même scénario. À l’approche de la fête de Achoura, pétards de tous genres et feux d’artifice inondent le marché. Ces produits, dont les dangers ne sont un mystère pour personne, sont de nature à gâcher la fête. Ces artifices sont d’ailleurs réglementés par la loi n° 22-16 portant sur la réglementation des produits explosifs à usage civil, des artifices destinés au divertissement et des matériels contenant des substances pyrotechniques, publiée au bulletin officiel le 26 juin 2018. Ladite loi stipule que les personnes impliquées dans l’importation ou la fabrication clandestine de matériaux pyrotechniques, ou en possession de produits explosifs ou de feux d’artifice, sans y être légalement habilitées, peuvent être condamnées à une peine de deux à cinq ans de prison ainsi qu’à une amende variant de 50.000 et 500.000 de DH. Cependant, l’application de ce texte dépend de la publication de décrets, qui n’ont pas encore vu le jour. Ainsi, même avec les dispositions de l’état d’urgence sanitaire, ces produits sont toujours disponibles dans les villes du Royaume.

La Direction générale de la Sûreté nationale (DGSN) lutte contre le dangereux emploi des artifices de divertissement. Dans un communiqué, les autorités ont annoncé qu’une patrouille de policeavait interpellé l’un des mis en cause, un mineur âgé de 17 ans, en flagrant délit de possession et de vente de pétards de contrebande. Le père du suspect, qui exerce dans la police, son frère aîné, ainsi que plusieurs de ses connaissances sont intervenus pour entraver les procédures d’interpellation, en refusant d’obtempérer et en résistant aux agents de sécurité. Ainsi, le policier mis en cause, un officier de paix principal, et le frère majeur du prévenu, ont été placés en garde à vue, tandis que le mineur a été placé sous contrôle à la disposition de l’enquête judiciaire menée sous la supervision du parquet compétent, pour élucider les circonstances de cette affaire et interpeller toutes les personnes impliquées, ajoute le communiqué. En attendant la fin de l’enquête en vue de prendre les mesures administratives nécessaires, la DGSN a décidé de suspendre provisoirement l’officier, conclut la même source.

Dernier articles
Les articles les plus lu

MRE, qui ne veut pas de vous ?

DOSSIER - C’est l’histoire d’un MRE qui a failli perdre la vie dans une altercation autour d'une terre. Une affaire sordide où advient aussi le « racisme anti-MRE ».

Sabrina El Faiz - 21 décembre 2024

L’école marocaine, un rêve empreint d’inégalité

Société - Malgré des avancées notables, le Maroc continue de faire face à des inégalités éducatives importantes.

Ilyasse Rhamir - 20 décembre 2024

Casablanca intègre le C40 des villes engagées pour les actions climatiques

Société - La commune de Casablanca a annoncé son adhésion au réseau mondial C40 des villes, regroupant près de 100 villes engagées dans des actions climatiques.

Mbaye Gueye - 20 décembre 2024

Alerte météo : chutes de neige samedi et dimanche

Société - Des chutes de neige sur les hauteurs dépassant les 1.800 m, sont prévues dans certaines provinces du Royaume.

Rédaction LeBrief - 20 décembre 2024

Quel est le vrai taux de chômage au Maroc ?

Société - Un jeune Marocain sur deux, âgé de 15 à 24 ans, vivant en milieu urbain, est au chômage selon BAM. Le HCP révèle un taux de 13,6 % et 21,3 % d’après le RGPH.

Ilyasse Rhamir - 19 décembre 2024

Latifa Akharbach défend le droit universel à l’éducation numérique

Société - Latifa Akharbach, présidente de la HACA, a souligné que l’éducation à l’information et au numérique doit être considérée comme un droit universel.

Ilyasse Rhamir - 19 décembre 2024

Radars fixes : 270 millions gaspillés, une enquête en cours

Société - La BNPJ enquête sur les anomalies relevées par la Cour des comptes concernant le marché public de radars fixes.

Ilyasse Rhamir - 19 décembre 2024

Migration : un nouvel axe Maroc-UE en construction

Société - Le Maroc et l’Union européenne (UE) s’apprêtent à franchir une nouvelle étape dans leur collaboration stratégique sur le dossier migratoire.

Ilyasse Rhamir - 19 décembre 2024
Voir plus

Héritage, la succession qui déchire

Société - L'heure n'est pas aux comptes, et pourtant les familles se divisent pour l'indivisible. Immersion dans un héritage déchirant.

Sabrina El Faiz - 9 novembre 2024

Notes de route du Sahara

Société - Très impressionnante, l'histoire de sa vie fait d'elle un personnage romanesque. A son premier voyage dans le Sahara, Isabelle Eberhardt, reporter, voyageuse et aventurière, tombe amoureuse de cette terre et de ses gens.

Rédaction LeBrief - 4 avril 2024

L’INDH : 18 ans après, quel bilan ?

Société - Lancé en 2005 par le roi Mohammed VI, l’Initiative nationale pour le développement humain souffle aujourd’hui ses 18 bougies.

Hajar Toufik - 18 mai 2023

Nouvelles du Maroc

Société - À l'extrême ouest du Maghreb, tête de pont vers les Amériques, point de passage vers l'Europe par le détroit de Gibraltar, le Maroc est un carrefour d'influences unique au monde où se mélangent modernité et traditions.

Rédaction LeBrief - 1 avril 2024

Le racisme expliqué à ma fille

Société - Un enfant est curieux. Il pose beaucoup de questions et il attend des réponses précises et convaincantes. C’est en m’accompagnant à une manifestation contre un projet de loi sur l’immigration que ma fille m’a interrogé sur le racisme.

Rédaction LeBrief - 22 mars 2024

Bidonvilles, pourquoi y en a-t-il encore ?

Dossier - Ces habitats se concentrent dans les périphéries ou au sein de bidonvilles, où les efforts de résorption peinent à suivre.

Sabrina El Faiz - 30 novembre 2024

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire