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Retour du régime taliban : réactions internationales mitigées

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Les talibans ont repris le pouvoir en Afghanistan, alors que l’échéance du retrait des forces américaines approche à grands pas. La victoire des rebelles, qui ont gouverné le pays de 1996 à 2001, a été imputée à l’échec du gouvernement en place et de ses militaires à défendre les intérêts des Afghans et de leur État. Le président américain Joe Biden a déclaré qu’il refuse de reporter ou d’annuler le rapatriement des troupes américaines, tandis que d’autres dirigeants appellent à la protection des civils, surtout les femmes. Tour d’horizon des principales réactions internationales au retour du régime taliban.

«La guerre est finie», tels sont les mots que les combattants talibans ont criés dimanche dernier après avoir conquis Kaboul et avoir poussé le président Ashraf Ghani à fuir l’Afghanistan. La progression du groupe rebelle dans le pays a été accélérée par le retrait progressif des forces armées des États-Unis et de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), mais sa victoire a pris de court plusieurs gouvernements occidentaux. Ces derniers s’empressent depuis ce lundi à évacuer leurs diplomates, leurs ressortissants et certains membres du personnel local afghan.

Lire aussi :Afghanistan : les talibans prennent le pouvoir

Pour sa part, Washingtonfait l’objet de vives critiques suite au retour des talibans au pouvoir, mais le président Joe Biden a déclaré qu’il ne compte aucunement revenir sur sa décision de retirer les troupes américaines de l’Afghanistan. Dans un discours prononcé dans la soirée de ce 16 août, le dirigeant démocrate a souligné que le gouvernement et l’armée afghans sont les seuls à blâmer pour leur incapacité à faire face à cette guerre éclair contre les talibans.«Nous leur avons donné toutes les chances de déterminer leur propre avenir. Mais, nous ne pouvons pasleur donner la volonté de se battre pour cet avenir», a-t-il indiqué. Biden a expliqué que la mission des États-Unis «n’a jamais étéde construire une nation». Et de lancer : «Je maintiens fermement ma décision. Les événements de la semaine dernière confirment que la décision de mettre fin à l’engagement militaire américain en Afghanistan était la bonne. Les troupes américaines ne peuvent et ne doivent pas se battre dans une guerre et mourir dans une guerre que les forces afghanes ne sont pas elles-mêmes prêtes à mener».

Lire aussi :Afghanistan : évacuation des ressortissants étrangers

L’allocution du nouveau locataire de la Maison-Blanche est intervenue alors que la presse internationale a diffusé des images de milliers d’Afghans qui tentent de fuir le pays pour échapper au régime des talibans. Les citoyens qui ont réussi à quitter l’Afghanistan affirment que le retour des rebelles marque la fin des progrès réalisés par leur pays au cours des 20 dernières années. Désormais, alors queles pays du monde entier, dont les États-Unis, tentent de récupérer leurs ressortissants, les Afghans désespérés affluent à l’aéroport pour trouver un moyen de prendre le premier avion disponible. Tous veulent éviter de revivre l’enfer qu’ils ont subit lors de la dernière domination des talibans, qui a duré de 1996 à 2001.

Lire aussi :Afghanistan : les premiers pas du régime taliban

Pour Merkel, la situation en Afghanistan est «dramatique et terrible»

Comme plusieurs leaders mondiaux, la chancelière allemande Angela Merkel a réagi au retour des talibans. Elle a déclaré que cette reprise du pouvoir est «particulièrement dramatique et terrible». «C’est terrible pour les millions d’Afghans qui avaient œuvrer pour une société plus libre et qui, avec le soutien de la communauté occidentale, se sont concentrés sur la démocratie, l’éducation etles droits des femmes». Auparavant, l’Allemagne a prévenu qu’elle cesserait d’aider l’Afghanistan en cas de prise de pouvoir militaire forcée. Le ministre des Affaires étrangères, Heiko Maas, a d’ailleurs précisé jeudi dernier à la chaîne de télévision allemande ZDF : «Nous n’enverrons plus un centime à ce pays si les talibans en prennent le contrôle total, y introduisent la charia et le transforment en califat».

L’Inde suit de très près la situation

Alors que le Premier ministre Narendra Modi n’a pas encore fait de commentaire sur la prise de pouvoir des talibans, le ministre des Affaires étrangères S Jaishankar a pris la parole sur Twitter pour noter que l’Inde suit la situation de près. «Je surveille en permanence la situation à Kaboul. Nous comprenons l’anxiété de ceux qui cherchent à entrer en Inde. Les opérations aéroportuaires constituent désormaisun granddéfi. Des discussions (sont) en cours avec les partenaires à cet égard», a-t-il déclaré.

L’Inde a envoyé des avions pour évacuer ses ressortissants au fur et à mesure que les talibans gagnaient du terrain. Le retour du régime taliban affecte directement le gouvernement indien, étant donné sa proximité avec l’Afghanistan. L’Inde a été le théâtre d’incidents terroristes soutenus par les rebelles par le passé. Muhammed Suhail Shaheen, porte-parole des talibans, a averti l’exécutif de Modi que s’il déploie ses forces militaires en Afghanistan, ces dernières ne seront pas épargnées.

Le Royaume-Uni appelle à une «approche unifiée»

Le Premier ministre britannique Boris Johnson, dont le pays assure la présidence tournante du G7, a appelé pour sa part à une réunion par visioconférence des dirigeants du groupe pour discuter de la crise afghane afin de convenir d’une «approche unifiée».Johnson a déjà indiqué vendredi dernier que le Royaume-Uni et ses partenairesveulent veiller à ce que «le gouvernement de Kaboul ne permette pas à ce pays, une fois de plus, de servir de terreau au terrorisme».

La France refuse de voir l’Afghanistan devenir un «sanctuaire du terrorisme»

Comme son homologue britannique, le président français Emmanuel Macron a soutenu ce lundi, lors d’une allocution télévisée, que l’Afghanistan ne doit pas redevenir un «sanctuaire du terrorisme». «C’est la clé de la sécurité et de la paix internationales… nous ferons tout pour que la Russie, les États-Unis et l’Europe coopèrent efficacement, car nos intérêts sont les mêmes», a souligné Macron. Il aappelé les membres duConseil de sécurité des Nations Unies à trouver une réponse «raisonnable et unifiée» et à se mettre d’accord sur des «initiatives conjointes» à mettre en place dans les prochaines heures. Le président a décrit la situation en Afghanistan comme un «défi important pour notre propre sécurité» et une «lutte contre un ennemi commun, le terrorisme».

La Turquie offre un «soutien technique»

Alors que le chaos règne à l’aéroport de Kaboul, la Turquie a déclaré qu’elle était prête à apporter son soutien aux talibans. Selon Reuters, un responsable turc a préciséqu’«à ce stade, c’est le chaos total à l’aéroport de Kaboul. L’ordre a été complètement perturbé… Par conséquent, le processus de prise de contrôle de l’aéroport par les soldats turcs a été automatiquement abandonné». «Toutefois, si les talibans ont besoin d’un soutien technique, la Turquie peut assurer la sécurité et le rétablissement de l’ordre à l’aéroport», affirme la même source.

La Turquie avait prévu de prendre le contrôle de l’aéroport de Kaboul après le retrait de l’OTAN, mais a renoncé à ce projetce lundi. 600 soldats turcs sont déployés en ce moment en Afghanistan et Ankara a proposé de les garder à Kaboul pour assurer la surveillance et le fonctionnement de l’aéroport après le départ des forces arméesétrangères.

Visionner aussi :Afghanistan : à Kaboul, des milliers de personnes tentent de fuir le pays

Moscou établit déjà des contacts avec le nouveau régime

Selon l’AFP, la Russie a «établi des contacts de travail avec les représentants des nouvelles autorités afghanes» et l’ambassadeur du paysà Kaboul, Dmitry Zhirnov, va rencontrer les talibans ce mardi. Bien que les photos montrant la panique des Afghans aient fait le tour de la presse mondiale, le ministère russe des Affaires étrangères a déclaré que la situation se «stabilise» et que les talibans ont commencé à «rétablir l’ordre public». Zhirnov a en plusaffirmé que les rebellesont promis de «garantir la sécurité de la population locale», et que son pays compte garder les portes de sa représentation diplomatique à Kaboul ouvertes, contrairement à plusieurs autres pays qui ont évacué leurs fonctionnaires du pays. Le responsable russe a également souligné que la situation dans la capitale sous le contrôle des talibans est «meilleure» que sous celui du gouvernementd’Ashraf Ghani.

La Chine se prépare à approfondir ses liens avec les talibans

Du côté de Pékin, la porte-parole du gouvernement, Hua Chunying, a souligné ce lundi que son pays est prêt à approfondir ses relations «amicales et coopératives» avec l’Afghanistan. «Les talibans ont déclaré à de multiples occasions qu’ils espéraient développer des relations solides avec la Chine, qu’ils attendaient avec impatience sa participation à la reconstruction et au développement de l’Afghanistan, et qu’ils ne permettraient jamais à aucune force d’utiliser le territoire afghan pour se livrer à des actes préjudiciables à la Chine», a précisé la responsable. Cette dernière a assuré que cette déclaration vient réjouir le gouvernement de son pays, surtout que Pékin a cherché à maintenir ses liens avec les talibans tout au long du retrait des États-Unis d’Afghanistan.

L’Arabie saoudite exhorte les talibans à adhéreraux «principes islamiques»

Le Royaume d’Arabie saoudite a exhorté les talibans à préserver les vies, les biens et la sécurité comme le stipulent les «principes islamiques». Le royaume a indiqué qu’il respectera les choixdu peuple afghan et qu’il ne compte pas s’ingérer dans ses affaires. L’Arabie saoudite espère que, grâce aux recommandations de l’Islam, la situation dans l’État d’Asie centrale se stabilisera au plus vite. S’agissant du reste des pays du Golfe, ils suiventattentivement les événements actuels. Le Qatar préconise une «transition pacifique» en Afghanistan et assure qu’il fera «tout son possible pour contribuer aux efforts d’évacuation des diplomates et du personnel étranger des organisations internationales du pays». «Doha a accueilli un bureau des talibans depuis 2013 pour des pourparlers de paix et a joué un rôle central pour tenter de parvenir à un règlement politique en Afghanistan avec le retrait des troupes américaines», a rapporté Reuters. Bahreïn, qui préside actuellement le Conseil de coopération du Golfe, a annoncé qu’il lancera bientôt des consultations avec les autres États du Golfe au sujet de la situation en Afghanistan.

L’Iran surveille l’évolution de la situation en Afghanistan

Téhéran a déclaré qu’il souhaite entretenir de bonnes relations avec son voisin oriental et qu’il «suivait de près» l’évolution de la situation. Le président du pays, Ebrahim Raisi, a précisé : «la défaite militaire et le retrait américain d’Afghanistan devraient offrir une opportunité de rétablir la vie, la sécurité et une paix durable dans ce pays». L’Iran accueille près de 3,5 millions d’Afghans, qui représentent près de 4%, selon l’agence des Nations unies pour les réfugiés.

Les agences d’aide de l’ONU

Enfin, l’agence de coordination de l’aide humanitaire des Nations Unies a affirmé que ses partenaires et elle-même «restent sur placepour venir en aide auxpersonnes dans le besoin», et ce, malgré la situation sécuritaire difficile d’Afghanistan. L’organisme onusien, dit OCHA,a noté: «la communauté humanitaire – tant les Nations unies que les organisations non gouvernementales – reste engagée à aider les gens dans le pays». OCHA a ajouté que des milliers de personnes déplacées à l’intérieur du pays et identifiées au cours des dernières semaines ont pu recevoir de la nourriture, de l’argent, des soins de santé ou encorede l’eau.

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