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Bien que la pandémie du nouveau coronavirus n’ait pas fondamentalement remis en cause la structure du système de santé marocain, elle a révélé ses fragilités. Les hôpitaux et leur personnel ont ensuite dû affronter le stress et les horaires infernaux en raison de la Covid-19 qui a fait plus de 9.000 morts au Maroc. Ainsi, ce secteur est tributaire d’une refonte totale après des décennies de dégradation de l’hôpital public, particulièrement après le coup d’envoi officiel du chantier royal de généralisation de la couverture sociale pour tous les Marocains.
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Alors que l’exécutif s’apprête à se pencher sur la réforme cruciale du système de santé, un groupe de travail thématique en charge du secteur de la santé formé par la Chambre des représentants a mené un travail laborieux sur cette question. Cette équipe a rédigé un document de près de 200 pages. Fruit d’un travail qui a démarré avant la fin de 2020, ce rapport a été présenté, ce mardi 8 juin, en séance plénière de la Chambre des représentants. Le travail de la commission parlementaire, qui a auditionné plusieurs responsables, professionnels et experts, dont les patrons de la Caisse nationale de sécurité sociale (CNSS), l’Agence nationale de l’assurance maladie (ANAM), la Caisse nationale des organismes de prévoyance sociale (CNOPS), des universités de médecine, a mis en évidence de nombreux dysfonctionnements.
Des dysfonctionnements profonds et évidents
Comme Khalid Aït Taleb, ministre de la Santé, les députés ont pointé les insuffisances et les dysfonctionnements qui minent le secteur de la santé. Ils ont reconnu les échecs du système actuel, comme en témoignent la problématique des disparités territoriales en matière de répartition des infrastructures et le manque d’équipement et de ressources humaines, dont le besoin s’estime à 97.566 professionnels selon les recommandations de l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Actuellement, le Maroc dispose de 8.442 médecins généralistes et 14.932 spécialistes. Dans le secteur public, le contraste est très apparent dans la répartition régionale de ces ressources. Ils sont 7.980 médecins publics dans les villes et 1.041 dans le monde rural. Cette problématique est aggravée par l’émigration des ressources humaines vers l’étranger. En effet, 7.000 médecins ont choisi de quitter le pays pour aller s’installer ailleurs. Selon le rapport, ce phénomène s’explique par plusieurs éléments, notamment l’absence d’incitations en mesure de les retenir dans le pays et d’encouragerles médecins à travailler dans le secteur public et dans les zones et les villages reculés.
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Outre le déficit en matièredecapital humain, le secteur souffre de plusieurs contraintes liées à la gouvernance, notamment en matière de gestion des hôpitaux publics. La commission parlementaire a pointé du doigt plusieurs problèmes liés notamment à l’absence de mécanismes pratiques et techniques permettant d’assurer un suivi efficace, tels que les systèmes nationaux d’information et de statistiques liés au domaine de la santé. De plus, les Centres hospitaliers universitaires sont absents dans certaines régions et le nombre de lits dans les centres hospitaliers est faible par rapport aux recommandations de l’OMS, estime le rapport. Dans le détail, le nombre d’établissements de santé au Maroc a atteint 3.005 en 2017, dont 2.038 en milieu rural. Le nombre d’hôpitaux a, quant à lui, atteint 158 en 2018 contre 130 en 2006, dont 25 hôpitaux universitaires, 26 hôpitaux régionaux, 77 hôpitaux dans les préfectures et régions, et 30 hôpitaux de proximité. Le nombre de lits a atteint 25.384 lits.
Enfin, le rapport souligne que les Marocains s’insurgent devant les prestations fournies par l’hôpital public. Ce constat concerneaussi le dispositif d’accueil, en plus de la faiblesse des infrastructures de base, souligne le groupe de travail. Les citoyens sont également mécontents des inégalités dans l’accès aux soins. Ceci concerne notamment l’augmentation des prix des médicaments et des coûts de soins ainsi que le contraste dans la couverture médicale obligatoire entre les secteurs public et privé.
Un financement insuffisant
En matière de financement de la santé, le Maroc fait face à trois défis majeurs. Bien que le ministère de la Santé ait entamé une réflexion générale à ce sujet en 2019, le budget alloué à ce secteur reste très faible. Il faut noter qu’au cours des dernières années, des hausses importantes ont été constatées. En effet, entre 2020 et 2021, ce montant a dépassé 19,774 milliards de DH (MMDH), soit une progression de 7,4%. En effet, les dépenses totales de santé sont estimées à 6,79% du budget général de l’État en 2021. Toutefois, ce budget est inférieur aux pays à revenu intermédiaire de la tranche supérieure ou des pays de la région. L’OMS recommande un taux de 10% du PIB. En ce qui concerne les établissements publics de santé, qui fournissent 77% du nombre de lits ainsi que le plus grand nombre de services médicaux, ils ne bénéficient que de 27,3% des dépenses totales de santé.
La moitié de ce financement provient des paiements directs des ménages. Le poids des dépenses supportées par les ménages a en effet atteint un pourcentage de 50,7% des dépenses de santé, alors que la couverture médicale ne dépasse pas 22% et le financement fiscal 24,4%.
Selon la commission parlementaire, il manque également les incitations fiscales et immobilières sur le plan régional. Ceci n’encourage pas le secteur privé à investir dans la santé, en particulier dans les zones qui enregistrent un encadrement médical très limité, explique le document.
Ce que préconise le rapport
Vu cet état déplorable, la reconstruction du secteur sur une base solide est d’autant plus urgente que plus de 22 millions de personnes supplémentaires seront prises en charge par l’Assurance maladie obligatoire d’ici 2023. Pour que la réforme puisse atteindre ses objectifs, il est impératif de s’atteler en priorité au problème du financement. Ainsi, le rapport préconise l’augmentation des dotations budgétaires accordées au secteur de la Santé.
Le rapport recommande d’accélérer la digitalisation du secteur de la santé, avec l’établissement du rôle de l’intelligence artificielle et les big data dans le domaine médical. Il est également préconisé de créer un dossier numérique du patient.
Afin de garantir la qualité des services de santé, le rapport recommande de développer les mécanismes modernes de contrôle et d’audit. Les rédacteurs du rapport estiment qu’il est impératif de doter les citoyens d’une carte de santé pour payer les soins, avec la liberté de choisir le médecin traitant. À cela s’ajoute l’importance du renforcement du rôle de l’Inspection générale de la santé.
Le document appelle à adopter une approche claire, notamment des paniers de soins, de tarification et du partenariat public-privé. Ainsi, il faut revoir les missions et les rôles du ministère de la Santé, estiment les députés. Il s’agit de se doter d’entités qui se chargent de présenter des avis sur les priorités à financer dans le secteur médical ainsi que de développer une approche anticipative des traitements, particulièrement les maladies chroniques. Le groupe de travail propose également de développer un panier de soins unifié pour toutes les catégories sociales et qui prend en compte les besoins et les attentes des régions, soulignant que la gestion des systèmes de couverture médicale devra être prise en charge par une seule Caisse. L’objectif est d’inventer un modèle marocain homogène en matière de procédures de traitement dans les différentes infrastructures, basé sur une couverture médicale globale.
Par ailleurs, le rapport préconise la création d’une Agence nationale supérieure de la santé, dotée de la personnalité morale et l’autonomie administrative et financière. Cette instance sera chargée de la mise en place des critères à respecter dans le secteur. De plus, les cliniques privées et les établissements équivalents doivent être autorisés à exercer leurs missions, sur la base d’un cahier des charges, avec des indicateurs de qualité et sécurité des soins. En outre, il faudra permettre aux laboratoires et aux cliniques de se rassembler dans des groupements d’intérêt économique, et ce, afin de dépasser les obstacles liés à la hausse des prix des équipements et des appareils techniques.
Enfin, en matière de gouvernance, le rapport prône la création du Conseil national consultatif de la santé et des autres commissions consultatives mentionnées dans la loi-cadre et la mise en place du Conseil supérieur de la santé et des établissements autonomes des médicaments et de la pharmacie. Il est impératif que le président d’université soit membre du conseil d’administration du CHU et le directeur du CHU membre du CA de l’université, soulignent les auteurs.
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Alors que la campagne de vaccination contre la Covid-19 constitue un impératif pour favoriser la relance économique du Royaume, des réformes urgentes s’imposent. Toutefois, avec les nouvelles vagues de la pandémie qui se manifestent sur le continent ainsi que les souches mutantes du virus compliquent de plus en plus cette opération, en plus du défi logistique au vu de la grande demande mondiale sur le vaccin, le système de santé du pays, qui était défaillant bien avant la pandémie de la Covid-19, fait face à plusieurs défis. La pandémie de la Covid-19 montre qu’il faut investir davantage dans les systèmes de santé. Une réalité dont le gouvernement a pris conscience. Troisième et dernier point du renforcement du capital humain, le secteur de la santé est l’un des quatre axes “stratégiques de transformation” proposés par la Commission spéciale sur le modèle de développement (CSMD) dans son rapport sur le nouveau modèle de développement (NMD).
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