Accueil / Politique

Brahim Ghali devant la justice espagnole : ce qu’il risque

Temps de lecture

Après plusieurs semaines de tensions croissantes entre le Maroc et l’Espagne, le chef du Front Polisario, Brahim Ghali, au cœur de cette crise, va enfin être auditionné par la justice espagnole. Selon le ministère marocain des Affaires étrangères, la comparution, mardi 1er juin, du dénommé Brahim Ghali devant la Haute cour nationale espagnole est une «évolution» dont le Maroc prend note. Pourquoi Brahim Ghali est-il poursuivi en justice ? Qu’est-ce qu’il risque ? Quelles sont les violations commises par l’Espagne dans le cadre de cette affaire ? Que représente cette comparution pour le Maroc ? Éclairage.

Brahim Ghali, chef du Front Polisario, va-t-il enfin répondre de ses crimes ? C’est entout cas ce qu’espèrent Fadel Breika, un dissident du groupe séparatiste, l’Association sahraouie pour la défense des droits de l’Homme (ASADEDH) et le Maroc. En effet, Ghali, qui a réussi à fuir la justice espagnole en 2013 et qui a annulé un déplacement le 9 novembre 2016 à Barcelone pour éviter de comparaître devant le tribunal, se trouve aujourd’hui dans la péninsule ibérique et va être entendu par le juge d’instruction de l’Audience nationale de Madrid ce mardi 1er juin.

Admis sous un faux nom depuis le 18 avril dernier à l’hôpital de Logroño après une infection à la Covid-19, le septuagénaire, désormais « hors de danger », sera auditionné par vidéoconférence dans le cadre de deux enquêtes pour « tortures » et « génocide ». Notons que, selon le gouvernement de Pedro Sanchez, ce dernier a été « directementinfiltré » en Espagne pour « des raisons strictement humanitaires » à bord d’un avion algérienmédicalisé, etce,grâce à un faux passeport diplomatique.

Lire aussi :Comparution de Brahim Ghali devant la justice espagnole : à quoi faut-il s’attendre ?

Pourquoi Brahim Ghali sera-t-il auditionné ? Et que risque-t-il ?

Deux accusations majeures ont été retenues contre le chef du Polisario. La première fait suite à une plaintepour « tortures » déposée par Fadel Breika, un opposant du groupe séparatiste naturalisé espagnol. La deuxième concerneune plainte pour « génocide », « assassinat », »terrorisme », « crimes contre l’humanité » et « enlèvement », entre autres, soumise par l’Association sahraouiebasée en Espagnepour la défense des droits de l’Homme (ASADEDH).

Hilal Tarkou, président de l’Association des avocats d’origine marocaine exerçant en Espagne, a souligné à nos confrères de Les Inspirations Éco que selon le code 604 de la justice ibérique, Brahim Ghali risque la prison permanente, soit l’équivalentd’une sentenceà perpétuité. Précisant que le juge d’instruction devrait également prendre en compte les considérations politiques liées à cette affaire, Me Tarkou estime que les procédures de cedossier seront très longues. Il confie au journal qu’«ils sont plus de 100 plaignants à convoquer, auditionner… examiner les preuves à charge, et ces dernières sont nombreuses et irréfutables». D’après lui, les plaignants vont probablement exiger la détention provisoire du prévenu en vertu de l’article 505 du Code pénal espagnol.

Par ailleurs, ce membre du barreau espagnol a tenu à contester la décision du juge d’instruction de refuser d’adopter des mesures conservatoires à l’encontre du leader des séparatistes, notamment le retrait de son passeport, bien qu’elle se conforme « avec l’article 17 de la Constitution espagnole, lequel porte sur la liberté de circulation » d’un prévenu jusqu’à la confirmation de sa culpabilité.

Lire aussi :Espagne : Brahim Ghali va comparaître par visioconférence devant l’Audience nationale

De graves violations du Code pénal espagnol

De son côté, Abdelkebir Tabih, avocat et militant des droits de l’Homme, déplore que dans le cadre de l’affaire Brahim Ghali «le gouvernement espagnol a violé son propre Code pénal». Il explique à la MAP qu’en avançant des considérations humanitaires pour justifier l’accueil du chef du Front Polisario, le gouvernement espagnol reconnait «qu’il était au fait de l’usurpation de l’identité de l’individu concerné et que son passeport était falsifié». De même que c’est une preuve que Madrid a bel et bien caché l’identité d’une personne poursuivie pour l’aider à échapper à une enquête judiciaire.Des actions, qui conformément à l’alinéa 3 de l’article 451 du Code pénal espagnol, sont considérées comme « un crime ». Et, toujours selon ce texte de loi, toute personnequia aidé un individu «à échapper aux recherches menées par l’Autorité pour des crimes contre l’humanité, des crimes contre des personnes, des conflits armés et le terrorisme», risque une peine allant de six mois à trois ans de prison. En outre, Me Tabih soutient que, comme tout immigré clandestin, la justice ibérique se doit de confisquer les fausses pièces d’identité et les faux papiers que Brahim Ghali a présentés pour entrer illégalement dans le pays.

Aussi, l’avocat juge parfaitement légitime la protestation et la réaction du gouvernement marocain vis-à-vis de son voisin du Nord, du fait quece dernier a non seulement accueilli sur son territoire un ennemi duRoyaume, mais qu’il l’a également autorisé à utiliser «un document officiel qu’il savaitfalsifié». Une autorisation qui, d’aprèsle journal espagnol El Pais, a été accordée comme une faveur à Alger, principal fournisseur de gaz de l’Espagne.

Lire aussi :L’ASADEHD demande le retrait du passeport de Brahim Ghali

Le Maroc ne décolère pas

Enfin, pour le ministère des Affaires étrangères, de la Coopération africaine et des Marocains résidant à l’étranger, certes la comparution de Brahim Ghali devant la Haute Cour Nationale espagnole ce mardi est une nouvelle évolution dans ce dossier, mais elle «ne constitue pas, pour autant, le fond de la crise grave» entre les deux pays. Dans une déclaration publiée ce lundi 31 mai, la diplomatie marocaine estime que «la comparution du dénommé Ghali confirme que(…) l’Espagne a bien fait rentrer, sciemment, sur son territoire, de manière frauduleuse et occulte, une personne poursuivie par la justice espagnole pour des plaintes déposées par des victimes de nationalité espagnole et pour des actes commis en partie sur le sol espagnol». La même source souligne que l’audition de Ghali représente «une première reconnaissance des droits des victimes et de la responsabilité criminelle et pénale de cet individu». Elle marque aussi la première convocation officielle du chef séparatiste par la justice espagnole pour qu’il réponde des multiples plaintes pour des crimes graves déposées contre lui.

La tutelle conclut sa déclaration en martelant qu’«il ne s’agit que de plaintes révélées au grand jour. Qu’en est-il de tous les enfants, les femmes et les hommes qui subissent les affres du Polisario ? Des traitements inhumains sont infligés quotidiennement aux populations de Tindouf – ces sans voix du Polisario – sans que justice ne leur soit rendue». Affaire à suivre

Dernier articles
Les articles les plus lu

Conseil de gouvernement : examen de sept projets de décret

Politique - Le Conseil de gouvernement, présidé par Aziz Akhannouch, se réunira jeudi à Rabat pour examiner plusieurs projets de décret et des propositions de nomination.

Rédaction LeBrief - 17 décembre 2024

Cour des comptes : le stress hydrique, un état d’urgence climatique et stratégique

Politique - Le rapport 2023-2024 de la Cour des comptes met en lumière les défis liés à la gestion hydrique.

Farah Nadifi - 17 décembre 2024

Le Parlement abrite le « Congrès du Futur » les 17 et 18 décembre à Rabat

Politique - Le Parlement marocain, avec ses deux Chambres, organise, en collaboration avec la Chambre des députés et le Sénat de la République du Chili, la prochaine édition du «Congrès du Futur»

Rédaction LeBrief - 17 décembre 2024

Akhannouch : bâtir aujourd’hui, rayonner en 2030

Politique - Aziz Akhannouch a mis en avant les progrès significatifs réalisés par le Maroc grâce à des choix stratégiques déterminants.

Ilyasse Rhamir - 17 décembre 2024

Akhannouch : les infrastructures, moteur du Maroc de demain

Politique - Aziz Akhannouch a souligné que le développement des infrastructures constitue un pilier central pour le progrès du pays.

Ilyasse Rhamir - 16 décembre 2024

Al Qods : le Parlement arabe salue le rôle du roi Mohammed VI

Politique - Le Parlement arabe a salué le rôle central du roi Mohammed VI, Président du Comité Al Qods, dans la défense de la cause palestinienne.

Ilyasse Rhamir - 15 décembre 2024

Chambre des conseillers : renforcement de coopération parlementaire Maroc-France

Politique - Cette rencontre a mis l'accent sur le renforcement des mécanismes de coopération parlementaire entre le Maroc et la France.

Rédaction LeBrief - 13 décembre 2024

L’intégration et la coopération au sein de l’atlantique élargi : un nouveau paradigme de paix et de développement

Politique - L’atlantique élargi, concept mettant en lumière la coopération entre les pays de l’atlantique nord et sud, s’affirme comme un modèle de partenariats régionaux.

Mbaye Gueye - 13 décembre 2024
Voir plus

PLF 2025 : 231 amendements examinés par la Chambre des conseillers

Politique - La Commission des finances de la Chambre des conseillers a reçu 231 amendements sur la première partie du Projet de Loi de Finances (PLF) 2025. Parmi eux, 66 ont été acceptés, 55 rejetés et 110 retirés. La majorité des propositions portaient sur le volet fiscal (177 amendements), suivi des volets douanier et divers.

Rédaction LeBrief - 4 décembre 2024

Diplomatie parlementaire : Ould Errachid en mission au Panama

Politique - Mohamed Ould Errachid se rendra au Panama les 4 et 5 décembre à la tête d’une délégation parlementaire marocaine.

Ilyasse Rhamir - 3 décembre 2024

Provinces du sud : visite historique de l’ambassadeur de France au Maroc

Politique - L’ambassadeur de France au Maroc, Christophe Lecourtier, a entamé une visite officielle dans les provinces du Sud du Royaume.

Farah Nadifi - 12 novembre 2024

Le prince Moulay Rachid a représenté le Roi à la cérémonie de réouverture de Notre-Dame de Paris

Politique - Le prince Moulay Rachid a pris part à la cérémonie de réouverture de la cathédrale de Notre-Dame de Paris .

Mbaye Gueye - 8 décembre 2024

Maroc-Chili : un partenariat renforcé pour un avenir commun

Politique - Le Maroc et le Chili ont affirmé leur volonté commune de renforcer leurs relations bilatérales et de consolider leur coopération dans tous les secteurs clés.

Ilyasse Rhamir - 18 décembre 2024

Rabat : réunion du Comité de suivi de la pêcherie de poulpe

Politique - Sous la présidence de Zakia Driouich, secrétaire d'État chargée de la Pêche maritime auprès du ministre de l'Agriculture, de la Pêche maritime, du Développement rural et des Eaux et Forêts, une réunion du Comité de suivi de la pêcherie de poulpe s'est tenue mardi à Rabat.

Farah Nadifi - 17 décembre 2024

Nasser Bourita reçoit le ministre djiboutien des AE, porteur d’un message au Roi

Politique - Le Royaume du Maroc s’est constamment engagé à soutenir Djibouti dans son processus de développement.

Mbaye Gueye - 4 décembre 2024

Éducation : un budget record, des résultats en berne

Politique - Malgré des budgets records atteignant 73,91 milliards de dirhams, le système éducatif marocain reste embourbé dans des problématiques structurelles.

Ilyasse Rhamir - 2 décembre 2024

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire