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Affaire Brahim Ghali : l’Espagne entre le marteau et l’enclume

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Le ministre des Affaires étrangères, Nasser Bourita, a mis une grande pression sur les responsables espagnols menaçant de rompre toutes relations avec le pays ibérique si Brahim Ghali, chef du mouvement séparatiste du Polisario, quitte le pays sans être jugé pour ses crimes. D’un côté, l’Espagne ne veut pas perdre l’allié stratégique qu’est le Maroc notamment dans la lutte contre le terrorisme, et de l’autre, elle importe du gaz de l’Algérie via le gazoduc Maghreb-Europe et ne souhaite pas que cette alliance très importante soit brisée.

L’arrivée en Espagne sous une fausse identitédu chef du mouvement séparatiste, fin avril dernier,afin de recevoir des soins dans un hôpital deLogroño, près de Bilbao, a pris une très grande dimension. L’Espagne qui voulait que l’accueil de Ghali passe inaperçu s’est retrouvée démasquée. L’information a fait le tour du mondeprovoquantau passage une grande colère des responsables marocains qui ont vu en cet acte une trahison et une grossière erreur commise envers un partenaire stratégique.

Le week-end dernier, le Maroc n’a pas hésité à évoquer la rupture de ses relations avec l’Espagne si Brahim Ghali quitte le pays avant qu’il ne soit jugé. Du côté espagnol, la position du pays sur cette question n’est pas claire. La ministre des Affaires étrangères a affirmé dans une déclaration accordée à une radio nationale espagnole que le chef du Polisario répondra à une série d’affaires judiciaires auxquelles il est lié, mais retournera à son pays après sa convalescence.

Lire aussi :Maroc-Espagne : le bras de fer continue

«Cette personne était dans une situation critique pour ses multiples problèmes de santé, y compris un cas grave de Covid-19. Après sa convalescence, il retournera dans son pays. Pendant ce temps, il fait face à une série d’affaires judiciaires et nous espérons qu’il s’acquittera de ses obligations envers la justice espagnole», a déclaré Arancha Laya Gonzalez, chef de la diplomatie espagnole.

Un allié de Ghali confirme qu’il ne comparaîtrapas devantlajustice

Salim Lebsir, numéro 2 du mouvement séparatiste du Polisario a informé les médias espagnols que Brahim Ghali quittera l’Espagne sans comparaître devant le juge. «Dès qu’il aura récupéré, soit dans 10 jours, il quittera le pays (…) Pourquoi il irait devant la justice», souligne Sami Lebsir.

À noter que Brahim Ghali avait refusé de signer une convocation pour comparaître au tribunal le 1er juin prochain. Il a affirmé qu’il devait d’abord consulter l’ambassade d’Algérie et certaines personnes en qui il a confiance. Ghali fait l’objet de plusieurs plaintes pour torture et crimes contre l’humanité déposées par des citoyens marocains et espagnols.

“Un autre visage de l’Espagne”

Mustapha El Khalfi, ex-ministre délégué chargé des Relations avec le Parlement et la société civile est revenu sur la tension actuelle entre le Maroc et l’Espagne.

«En matière d’immigration illégale, de trafic de drogue et de terrorisme, nous nous retrouvons face à une Espagne amie et coopérante au plus haut degré. En revanche, lorsqu’il s’agit de la question du Sahara marocain, nous nous retrouvons avec un autre visage de l’Espagne». C’est dire qu’entre le Maroc et l’Espagne, c’est deux poids, deux mesures. El Khalfi déplore l’attitude du gouvernement espagnol, qualifiant ainsi cet acte espagnol de «coup de poignard dans le dos», invitant l’Espagne à «laisser sa justice prendre les décisions nécessaires dans le dossier du dénommé Brahim Ghali».

Le contrat Gazoduc Maghreb-Europe risque de ne pas être reconduit

C’est l’un des risques majeurs d’une rupture de liaisons entre le Maroc et l’Espagne, la suspension du contrat Gazoduc Maghreb-Europe. Le site espagnol El Confidential Digital assure que la relation actuelle avec le Maroc complique le renouvellement de l’accord d’utilisation du gazoduc du Maghreb, qui expire dans quatre mois.

La même source souligne que l’Espagne a un plan B et se mobilise pour garantir l’approvisionnement de l’Algérie avant une éventuelle aggravation de la crise avec Rabat. Ainsi, le site souligne que la Sonatrach, société algérienne publique en charge de l’exploitation gazière dans le pays, «peut utiliser MedGaz», l’autre gazoduc reliant l’Algérie à l’Espagne, pour «transporter intégralement les 10 milliards de mètres cubes de gaz» achetés par l’Espagne auprès de l’Algérie chaque année. Cette alternative permettra donc à l’Espagne de continuer à importer du gaz «sans avoir à passer par le Maroc».

Lire aussi :Affaire Brahim Ghali : le Maroc ne décolère pas

Le site précise que «les tensions politiques dans les deux pays d’Afrique du Nord conduisent l’Algérie à riposter contre le Maroc. Un scénario qui, dans ce contexte d’escalade des tensions avec Rabat, profite à l’Espagne», rapporte El Confidential Digital.

D’après la même source, si l’Algérie décide de ne pas renouveler le contrat pour le gazoduc Maghreb-Europe, le Maroc rencontrera de grandes difficultés. Il devra «acheter près de la moitié de sa consommation de gaz dans un marché indexé sur le Brent, qui ne cesse d’augmenter, et sans le soutien de l’Espagne», qui sera assurée d’être approvisionnée par l’Algérie.

Néanmoins, le site assure que le gazoduc Maghreb-Europe, qui expire en octobre prochain, «reste essentiel pour garantir un approvisionnement sûr à l’Espagne». Le Gazoduc Maghreb-Europe est l’un des plus grands projets de la région. Long de 1.400 kilomètres, il transporte chaque année près de 12 milliards de mètres cubes de gaz algérien vers l’Espagne et le Portugal via le Maroc.

Que va donc faire l’Espagne ? Va-t-elle prendre le risque de mettre fin àun aussi grand projet ? Que serait la réaction algérienne si Brahim Ghali comparaît en justice ? L’Espagne et l’Algérie vont-elles trouver un compromis pour le bien de tous ? Affaire à suivre.

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