Ce mardi 10 août, le Maroc a célébré la journée nationale du migrant. Instituée par le roi Mohammed VI en 2003, cette journée témoigne de l’intérêt qu’accorde le Souverain à la communauté marocaine à l’étranger. Cette journée vise à promouvoir un espace de dialogue avec les Marocains résidant à l’étranger (MRE), et ce, afin de mieux prendre connaissance de leur situation et de leurs besoins, de répondre à leurs attentes et les informer des prestations assurées par les services extérieurs dansdifférents domaines.
Dans ce sens, le ministère délégué chargé des Marocains résidant à l’étranger a lancé, le mardi 3 août dernier, une nouvelle version de la plateforme virtuelle dédiée aux compétences marocaines du monde. Nommée « MAGHRIBCOM » (www.maghribcom.gov.ma), cette version actualisée intervient en application des hautes orientations royales qui appelle à accompagner les Marocains résidant à l’étranger, tout en veillant à améliorer les services et prestations qui leur sont destinés.
Le Maroc, un pays d’émigration par excellence
Le migrant : ce terme générique non défini dans le droit international désigne toute personne qui quitte son lieu de résidence habituelle pour s’établir ailleurs à titre temporaire ou permanent et pour diverses raisons. Le Maroc est principalement un pays d’émigration. Le Haut-Commissariat au plan (HCP) estime à plus de cinq millions les Marocains résidant à l’étranger, dont plus des quatre-cinquièmes sont en Europe.La France est sans conteste le pays qui capte le plus grand nombre de MRE. Les statistiques disponibles dans ce sens font état de 1,25 million de Marocains qui y résident. 180.000 Marocains résident en Allemagne alors que 880.000, soit 15% du total des communautés étrangères, habitent en Espagne. La Belgique accueille pour sa part près de 700.000 Marocains dont 460.000 naturalisés.
L’émigration marocaine vers l’étranger est ancienne et a pris de l’importance depuis les années 1960-70. À l’origine, la migration marocaine était une migration de travail. Les migrants, essentiellement des hommes analphabètes et sans qualification particulière, laissaient au Maroc leurs femmes et enfants, leur séjour à l’étranger étant envisagé comme provisoires. Ils étaient censés retourner au pays après une période plus ou moins longue en situation d’immigration et donc peu enclins à opter pour la nationalité du pays de résidence. Le mythe de migration de retour a pris fin avec l’arrêt de la migration pour raison de travail et la mise en œuvre de la procédure du regroupement familial dans les pays de destination entamée vers le début des années 1970.
Ainsi, progressivement, les migrants marocains ont développé une tendance à l’installation définitive dans les pays de résidence. Les Marocains résidant en France étaient les premiers à s’inscrire dans cette démarche, suivis par ceux de Belgique, des Pays-Bas et d’Allemagne.
La migration marocaine vers l’étranger a donc beaucoup évolué au cours des dernières décennies : ses effectifs ont fortement augmenté malgré la multiplication des obstacles à l’immigration ; de migration temporaire, elle est devenue permanente ; elle s’est féminisée grâce au regroupement familial, mais aussi à la migration féminine autonome ; son niveau d’éducation et de formation s’est élevé ; elle s’est redéployée en Europe, des pays traditionnels d’immigration de l’ouest de l’Europe (France, Belgique, Pays-Bas, Allemagne) vers de nouveaux pays d’immigration (Italie, Espagne, pays du Golfe, Canada et États-Unis).
Les migrants, acteurs du développement de leur pays d’origine
Les migrants sont-ils vraiment des acteurs du développement de leur pays d’origine ? Ce questionnement a surgi dans le débat public au début des années 2000. Les organisations internationales avaient alors souligné que le total mondial des transferts financiers envoyés par les migrants dans leur pays d’origine représentait un flux trois fois supérieur au montant total de l’aide au développement.
Au cours des décennies, le débat a porté sur le fait que l’émigration conduit à une fuite des cerveaux qui laisse le paysdémuni de son capital humain qualifié. Récemment, cependant, de plus en plus de points de vue suggèrent que l’émigration pourrait entraîner des bénéfices dans les pays d’accueil comme dans leurs pays d’origine. Le talent pourrait être beaucoup plus productif ailleurs, avec des effets positifs pour le pays d’origine plus tard. Ces bénéfices sont liés aux réactions des marchés du travail, aux envois de fonds et aux transferts sociaux, aux effets sur le commerce, les investissements, et au transfert du capital humain, des innovations et aux migrations de retour et circulaires.
Les MRE, un réservoir d’expertise à même de contribuer aux efforts de développement
Présents dans plus de 100 pays à travers le monde, les MRE sont des ponts entre le Maroc et les marchés internationaux. Conscient des intérêts de la migration pour le pays d’origine, le Maroc, qui devient lui-même une terre d’immigration, réserve une place importante pour les MRE dans son optique de développement durable. En effet, la diaspora marocaine, qui contribue à l’essor économique du Maroc et à son rayonnement à l’étranger, occupe une place importante dans le Nouveau modèle de développement. La Commission spéciale sur ce modèle de développement a réitéré dans son rapport l’importance de la mise en œuvre des dispositions constitutionnelles, pour une meilleure représentation de notre diaspora, plus particulièrement à travers le renforcement du Conseil de la communauté marocaine à l’étranger (CCME).
Dans un entretien accordé à l’Agence marocaine de presse (MAP), Abdellah Boussouf, secrétaire générale de ce conseil, a indiqué que ce dernier suit de près la situation des Marocains du monde et les différentes problématiques auxquelles ils sont confrontés afin de pouvoir élaborer des propositions de solutions. Dans ce cadre, des recommandations d’ordre social, administratif, économique et religieux sont régulièrement proposées par le Conseil. De plus, le Conseil veille à maintenir les liens culturels et religieux avec les Marocains du Monde, et ce, à travers sa plateforme numérique Awacer TV, ajoute Boussouf. La plateforme propose une programmation riche est diversifiée et des débats quotidiens avec la participation de plusieurs acteurs de l’émigration marocaine dans tous les domaines. Cela s’ajoute à la disponibilité permanente du CCME qui est toujours à l’écoute des problématiques et des difficultés des MRE pour les transmettre aux différents acteurs institutionnels et trouver les solutions adéquates.
Les MRE sont attachés à leur patrie, surtout en période de crise. En effet, contrairement aux attentes des institutions financières, les transferts des MRE ont augmenté de 5% en 2020 à 70 milliards de dirhams, et de 48% au cours du premier semestre de cette année. Boussouf regrette toutefois que les rôles des MRE dans le rayonnement économique et culturel du Maroc soientpeu exploités. Ainsi, le prochain gouvernement sera chargé de définir une politique publique tenant compte des recommandations du modèle de développement et des dispositions de la Constitution de 2011.
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