Accueil / Société

Covid-19 : l’obligation vaccinale se dessine

Temps de lecture

Bon élève de la vaccination contre le coronavirus, le Royaume fait aujourd’hui face à une augmentation du nombre de cas positifs. Pour faire face à la menace d’une catastrophe sanitaire, les autorités ont accéléré la vaccination des personnes ciblées. Un signe évident de l’imminence d’un arrivage de nouvelles doses de vaccin. Par ailleurs, alors que le Maroc pourrait conditionner l’accès aux lieux de travail aux personnes vaccinées, cette hypothèse suscite un vif débat. L’employeur est-il habilité à interdire aux salariés non-vaccinés l’accès à l’entreprise et leur imposer la vaccination ?

Le coronavirus fait toujours des ravages dans le monde. Le nombre de cas quotidien ne cesse d’augmenter et de nouveaux variants sont détectés aux quatre coins du globe. Au Maroc, l’épidémie connaît uneflambée sans précédent. Les nouveaux cas ont progressé de 133% entre le 20 juillet et le 2 août. De plus, le Royaume a même franchi le cap des 10.000 nouveaux cas et 100 décès recensés en 24 heures ces derniers jours.

Alors que les experts prédisent que le pic ne serait atteint que « dans les prochains jours », le gouvernement a imposé de nouvelles restrictions. Pour tenter de l’enrayer, les autorités ont élargi mardi dernier les horaires du couvre-feu en vigueur depuis fin décembre : il est interdit de sortir de chez soi, sauf cas particuliers, de 21h à 5h. Ont aussi été imposées des restrictions de déplacements vers et depuis la principale ville du pays et capitale économique, Casablanca, ainsi que deux métropoles touristiques, Marrakech et Agadir. Les personnes munies de passeport vaccinal ou se déplaçant pour des raisons professionnelles ou médicales ne sont pas concernées par cette restriction.

Avec ses 36 millions d’habitants, le Royaume mise sur sa campagne de vaccination pour juguler la pandémie : plus de 15 millions de personnes ont reçu la première dose du vaccin contre la Covid-19 et plus de 11 millions sont totalement vaccinés.

Lire aussi :La campagne de vaccination élargie aux 20-25 ans

Grâce à sa stratégie d’immunisation de sa population et d’approvisionnement en vaccins, le Royaume est l’un des pays qui enregistrent les plus forts taux de vaccination dans le monde. Pour tenir son pari de l’immunité collective, le Maroc a passé commande de plusieurs millions de vaccins. D’ailleurs, un nouvel arrivage de vaccins est attendula semaine prochaine. Il s’agit de deux millions de doses du sérum chinois de Sinopharm, prévues pour le lundi 16 août 2021. Avec cette imminente livraison, le nombre de doses reçues par le Maroc atteindra 33.760.000 doses, de quoi immuniser près de 17 millions deMarocains. Outre cette cargaison, une autre livraison est également attendue. En effet, entre 1,8 et 2 millions de doses de vaccin P?zer seront réceptionnées au cours de la deuxième quinzaine de ce mois d’août, probablement vers la mi-août. Grâce à ces doses, le Royaume pourra poursuivre normalement sa campagne de vaccination contre le coronavirus à l’approche de la rentrée scolaire.

Pourquoi est-il important de se faire vacciner ?

Après l’élargissement de la campagne de vaccination anti-Covid-19aux personnes âgées de 20 ans et plus, le ministère de l’Éducation nationale, de la Formation professionnelle, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique a appelé les étudiants à se faire vacciner contre la Covid-19. L’objectif est d’assurer «que la prochaine rentrée universitaire puisse se dérouler dans des conditions optimales de sécurité pour tous».

Lire aussi :Covid-19 : comment va se passer la rentrée scolaire ?

Ainsi, le gouvernement appelle de nouveau à une vaccination massive contre la Covid-19, et ce, après avoir mis en place des mesures pour faciliter l’accès au vaccin. En effet, les centres de vaccination sont désormais ouverts 7j/7 jusqu’à 20h et les personnes concernées par cette campagne peuvent se rendre au centre le plus proche, sans aucune condition de rendez-vous,d’adresse ou de domicile, pour recevoir leurs doses.

À travers l’immunisation de la population, le gouvernement espère aussi éviter, non pas seulement des décès, mais aussi avoir une protection suffisante pour éviter les hospitalisations et les réanimations. La situation pourrait néanmoins être problématique si les Marocains refusent de se faire vacciner. Dans ce cas, le coronavirus pourrait continuer dese propager pendant des mois, peut-être même des années. Les infections, les cas graves, les décès, se multiplieraient chez les personnes non-vaccinées, mais aussi chez les personnes vaccinées, quand leur immunité va faiblir. Comme pour toute intervention médicale, le risque zéro n’existe pas. Des effets indésirables bénins peuvent se manifester après une vaccination, toutefois, les effets graves sont très rares.

Lire aussi :Les vaccins sont-ils efficaces contre le coronavirus ?

L’employeur peut-il imposer la vaccination aux salariés ?

Alors que certains pays sont au bord du désespoir, les vaccins offrent un grand espoir pour renverser le cours de la pandémie. La vaccination est même devenue obligatoire pour se déplacer, voyager, etc. En France, l’extension du pass sanitaire a provoqué un débat frelaté autour des libertés. Au Maroc également, on se dirige vers le conditionnement de l’accès à certaines activités et aux lieux de travail à la vaccination. D’ailleurs, dans une récente note adressée à ses adhérents, la Confédération générale des entreprises du Maroc de la région de Tanger-Tétouan-Al Hoceima recommande aux entreprises de demander un passeport vaccinal à leurs collaborateurs. «L’État a pris des décisions importantes en mobilisant ses ressources financières, logistiques, opérationnelles et organisationnelles. L’entreprise peut dorénavant, dans une stratégie préventive de lutte contre la propagation de la Covid-19 et dans la recherche d’une immunité collective, demander la présentation du passeport vaccinal pour permettre l’accès au travail. Il convient de mobiliser les syndicats, les délégués du personnel et le comité de sécurité et d’hygiène pour réussir cette campagne», lit-on dans ce document. Et d’ajouter que «le cas échéant, les salariés ne respectant pas les mesures d’urgences sanitaires pourraient être empêchés d’accéder à leur travail».

La simple évocation de la mise en place de ce pass a généré inquiétude, débats et confusion parmi les personnes concernées. Pour certains, l’employeur ne peut pas obliger ses collaborateurs à se faire vacciner, alors que pour d’autres, il est responsable en vertu du droit de la santé et la sécurité au travail de protéger l’ensemble de ses salariés et d’exiger donc à ce qu’ils soient immunisés.

Pour Saïd Lamani, inspecteur dutravail à la retraite et actuellement consultant en Droit du travailjoint par la rédaction de LeBrief, l’employeur n’est pas habilité à interdire aux salariés non-vaccinés l’accès à l’entreprise nileur imposer la vaccination dans un but préventif. «À mon avis, ce n’est pas légal», a-t-il indiqué. Citant l’arrêt du Conseil constitutionnel français du 5 août 2021, il a indiqué qu’un employeur ne peut licencier un salarié qui refuse de se faire vacciner, même s’il fait partie d’une profession soumise à l’obligation vaccinale. «En somme, un employeur ne peut pas exiger, mais seulement inciter ses salariés à se faire vacciner. La possibilité de licencier pour non-vaccination était initialement prévue dans le projet de loi, mais a finalement été supprimée». Toutefois, si le licenciement n’est plus possible, la suspension du contrat et de la rémunération est en revanche prévue.

Selon notre interlocuteur, il est important, aussi, de garantir la confidentialité des données personnelles et de rappeler aux salariés que le secret médical doit êtrerespecté. Cependant, alors que «l’employeur ne peut pas savoir qui est vacciné et qui ne l’est pas, il n’empêche qu’il est important pour lui d’avoir accès à des statistiques permettant de connaître le nombre de salariés vaccinés au sein de son entreprise et, ainsi, de moduler le temps de travail en présentiel ou à distance en fonction de ces chiffres. Cette notion d’immunité collective est importante pour les entreprises».

Par ailleurs, M. Lamani n’a pas manqué de soulignerque, conformément à une jurisprudence constante, la vaccination peut faire partie des mesures qui s’imposent. Il a cité l’exemple d’un arrêt du 11 juillet 2012, dans le cadre duquel la Cour de cassation a pu considérer que le refus d’un salarié du secteur des pompes funèbres de se faire vacciner contre l’hépatite B constituait une cause réelle et sérieuse de licenciement. Ainsi, dans des cas similaires, l’obligation vaccinale s’inscrit dans le cadre de l’obligation de sécurité imposant à l’employeur de prévenir les risques professionnels. De ce fait, ce dernier doit mettre en place les mesures nécessaires à la protection des salariés contre des agents biologiques pathogènes.

Que le pass sanitaire soulève nombre de questions quant à son application, c’est l’évidence. En l’espèce, il s’agit d’un combat dilatoire qui s’appuie sur une bataille de principe autour des libertés. Toutefois, il est à rappeler que l’obligation vaccinale existe depuis des dizaines d’années, et nous protège d’ailleurs collectivement. C’est sur les non-vaccinés que doit peser la contrainte. Il est rapidement et gratuitement possible de s’en défaire en se faisant vacciner.

Dernier articles
Les articles les plus lu

Le CSPJ rappelle ces magistrats à l’ordre

Société - Le Conseil supérieur du pouvoir judiciaire (CSPJ) démontre une volonté affirmée d’instaurer une gouvernance plus intègre.

Mbaye Gueye - 17 décembre 2024

Travaux imprévus à Maarif, circulation paralysée, la goutte de trop

Société - Les Casablancais qui empruntent le quartier Maarif sont confrontés à un véritable casse-tête. Des travaux… Encore !

Rédaction LeBrief - 16 décembre 2024

Peines alternatives : vers une justice plus humaine

Société - La justice marocaine franchit un cap avec l’entrée en vigueur de la loi sur les peines alternatives, un texte ambitieux visant à moderniser le système judiciaire.

Ilyasse Rhamir - 16 décembre 2024

Arts et métiers : une ambition maroco-française au service de l’innovation industrielle

Société - Le 5ᵉ CA de l’école Arts et Métiers, campus de Rabat, s’est tenu le 16 décembre 2024 sous la présidence de Ryad Mezzour.

Rédaction LeBrief - 16 décembre 2024

Enseignement : des réformes urgentes face à un système en crise

Société - Le dernier rapport de la Cour des comptes dresse un état des lieux préoccupant du secteur de l’enseignement au Maroc.

Ilyasse Rhamir - 16 décembre 2024

Spoliation immobilière : un homme d’affaire écope de six ans de prison ferme

Société - La Chambre criminelle de première instance a condamné Abdallah Boudrika à six ans de prison ferme pour spoliation immobilière.

Mbaye Gueye - 16 décembre 2024

Alerte Météo : vents violents au nord du Maroc

Société - La DGM a émis un bulletin d’alerte de niveau orange concernant des rafales de vent localement fortes prévues lundi dans certaines provinces du nord du Maroc.

Ilyasse Rhamir - 14 décembre 2024

Saigner pour guérir

Dossier - Rien qu’un rasoir, une pipette et un seau ne peuvent guérir. Car la saignée est réputée pour être «miraculeuse».

Atika Ratim - 14 décembre 2024
Voir plus

Al Akhawayn alumni association se digitalise

Société - L’Association des lauréats de l’université Al Akhawayn franchit une étape dans sa modernisation en lançant une plateforme numérique.

Rédaction LeBrief - 6 décembre 2024

Aïn Sebaa : un zoo de 13 hectares prêt pour 2025

Société - Le Conseil communal de Casablanca, sous la direction de Nabila Rmili, a validé le projet de gestion déléguée du zoo de Aïn Sebaa.

Ilyasse Rhamir - 29 novembre 2024

En janvier, le prix de certains paquets de cigarettes augmentera de 1 à 2 DH

Société - Certains paquets de cigarettes verront leur prix augmenter de 1 à 2 dirhams à partir du 1er janvier 2025.

Mbaye Gueye - 9 décembre 2024

Spoliation immobilière : un homme d’affaire écope de six ans de prison ferme

Société - La Chambre criminelle de première instance a condamné Abdallah Boudrika à six ans de prison ferme pour spoliation immobilière.

Mbaye Gueye - 16 décembre 2024

Rabat : les détails du nouveau plan d’aménagement révélés

Société - L'Agence Urbaine de Rabat-Salé a finalement levé le voile sur le projet d’aménagement de la capitale.

Hajar Toufik - 30 août 2023

Le Groupe scolaire de Bourgogne ferme son établissement sans préavis

Société - La fermeture du groupe scolaire est attribuée à des problèmes juridiques signalés dès le début de l’année scolaire.

Mbaye Gueye - 2 décembre 2024

Recensement 2024 : 36,8 millions d’habitants au Maroc

Société - Le Maroc officialise les chiffres du recensement 2024 : le pays compte désormais 36,8 millions d’habitants.

Ilyasse Rhamir - 7 novembre 2024

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée Champs requis marqués avec *

Poster commentaire