Depuis plus de trente ans, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) évalue l’évolution du changement climatique, ses causes, ses conséquences, mais aussi les moyens de l’atténuer et de s’y adapter. Ce lundi 9 août, la première partie du sixième rapport du Giec, qui a été adoptée par les délégations des 195 pays engagés dans la lutte contre le réchauffement du climat et signataires de l’Accord de Paris, a été rendue publique. Ce rapport sur les bases physiques du climat sera suivi en février 2022 du chapitre sur l’impact sur les activités humaines et leurs nécessaires adaptations, et en mars par une revue des moyens à mettre en œuvre pour atténuer le changement climatique.
Le message de ce rapport-choc est le suivant : l’heure n’est plus aux discussions, nous devons agir?. En effet, la situation n’a cessé d’empirer depuis 2013-2014, lors de la publication de la précédente évaluation. Après avoir passé en revue plus de 14.000 études scientifiques et avoir reçu plus de 78.000 commentaires et observations de chercheurs et experts, les 234 auteurs de 66 pays ont révélé un approfondissement de la connaissance de la machinerie planétaire et de son climat passé, présent et futur.
C’est désormais une certitude : les enfants d’aujourd’hui et demain grandiront dans une Terre transformée par le changement climatique. D’ailleurs, ce dernier est principalement provoqué par les émissions humaines. «Il est clair depuis des décennies que le système climatique de la Terre change, et l’influence humaine sur le système climatique est incontestée», a déclaré Valérie Masson-Delmotte, coprésidente du groupe d’experts ayant élaboré ce texte.
La hausse de la température de la planète s’accélère et chacune des quatre dernières décennies a été plus chaude que la précédente, soulignent les experts. De plus, l’objectif de maintenir le réchauffement de la surface de la Terre à 1,5°C d’ici la fin du siècle est déjà hors de portée. Au rythme actuel des émissions, cet objectif pourrait être atteint entre l’année prochaine et 2040, selon le rapport. Les 2°C de réchauffement, eux, sont attendus autour du milieu du siècle si les émissions de gaz à effet de serre stagnent. Le scénario le plus optimiste de réduction très rapide et massive des émissions de gaz à effet de serre -peu vraisemblable au regard de l’engagement des grands pollueurs- prévoit désormais un pic à +1,6 °C avant un retour à +1,4° vers la fin du XXIe siècle.
Ainsi, les regards se tournent désormais vers Glasgow où se réuniront en novembre les dirigeants du monde entier dans le cadre de la 26e conférence annuelle des Nations Unies sur le climat (COP26).
Le pire est encore à venir
Feux de forêt en Amérique du Nord, en Sibérie, et depuis peu en Turquie et en Grèce ; pluies diluviennes en Allemagne, en Belgique, en Chine ou en Inde ; famine à Madagascar (la première de l’histoire moderne à être entièrement causée par le changement climatique)… Depuis le début de l’été, les catastrophes liées au réchauffement planétaire se succèdent. Les événements météorologiques extrêmes que nous vivons déjà ne feront que s’amplifier, si rien n’est fait.
Certaines conséquences du réchauffement de la planète, notamment la fonte des glaces et la hausse du niveau des mers, sont désormais «irréversibles pour des siècles ou des millénaires», estiment les experts climat de l’ONU. En effet, quel que soit le rythme des futures émissions de gaz à effet de serre, le niveau des océans va continuer à augmenter, et ce, sous l’impulsion de la fonte des calottes glaciaires. Le Giec estime que ce niveau pourrait gagner jusqu’à un mètre d’ici 2100.
Les forêts, les sols et les océans, qui ont réussi à retirer de l’atmosphère 56% du CO2 émis par les activités humaines sur les six dernières décennies, limitant ainsi le réchauffement, risquent de devenir «moins efficaces» à l’avenir, alerte le rapport. La capacité de ces puits de carbone à absorber le CO2 émis par les hommes risque de s’affaiblir avec la poursuite des émissions, menaçant les efforts pour limiter le réchauffement de la planète à des niveaux acceptables, ont mis en garde les experts climat de l’ONU.
Le rapport souligne également que le CO2 n’est pas le seul ennemi. Les concentrations de méthane et de protoxyde d’azote sont aujourd’hui à leur niveau record depuis 800.000 ans. Bien qu’il ne reste dans l’atmosphère qu’une douzaine d’années, le potentiel de réchauffement du premier gaz est près de 90 fois supérieur à celui du CO2. De plus, des milliards de tonnes dans les prochaines décennies de méthane risquent d’être libérés à cause de la fonte des glaces en Arctique. Notons que les émissions humaines de méthane (Ch4), principal gaz à effet de serre après le CO2 et désormais «responsable d’un quart du réchauffement climatique»?, proviennent de trois grands secteurs : 40% pour l’agriculture, 35% pour les énergies fossiles et 20% pour les déchets.
Il y a des signes qui ne trompent pas. Le changement climatique n’aura pas seulement des effets dévastateurs à l’avenir. Nous subissons déjà les conséquences des activités humaines sur notre planète, comme l’avaient indiqué les scientifiques. Certes, il est irréversible, mais il peut être corrigé grâce à une action forte et coordonnée de tous les États. L’humanité peut encore s’orienter vers un avenir meilleur. Ceci ne peut être atteint qu’en adoptant des mesures immédiates et drastiques.
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